Le Brésil n’est pas le paradis

10 mars 2016

Opéra de Sâo Paulo, la foule en habits de soirée descend le grand escalier pour papoter un peu dans le grand hall après le spectacle.

- Combien tu vois de métis ou de noirs ? Demande Raoul à Rose.

- Heu, ben… Si là-bas, il y a une jeune femme métis. Autrement, ils sont tous blancs.

Les Piche traversent le boulevard en face de l’opéra. Là, au pied de la longue vitrine d’un grand magasin une quizaine de sans abris sont allongés sur des cartons. Comme à de nombreux endroits dans la ville.

- Combien tu vois de blancs parmi eux ? Demande Rose à Raoul.

- Heu, ben… Ah ! Si, il y a un blanc, répond Raoul.

A 50 mètres de distance, tout semble dit sur le niveau d’inégalité dans ce pays.

Certes, les Piche ne sont pas en voyage d’étude socio-économique au Brésil, néanmoins ils ont des yeux pour voir. Ils voient que dans les hôtels, le personnel de service le plus subalterne est toujours métis, que les gardiens des immeubles défendus par mille protections dans les quartiers riches sont toujours des métis, qu’à la télévision, sur O Globo la chaine la plus regardée, les journalistes sont tous blancs (”non, non corrige Rose, la présentatrice de la météo est métis”, exact), que sur la chaîne parlementaire les Piche n’ont vu débattre que des hommes blancs et très peu de femmes. Il faut savoir que sur les 204 millions de personnes qui peuplent le Brésil 43,1% sont métis, 7,6% noirs, 47,7 % blancs. il y a donc un peu moins de blancs que de métis et de noirs.

Les observations superficielles de Rose et de Raoul sont confortées par leurs lectures (leurs yeux leur servent aussi à cela ). Ils apprennent ainsi qu’au Brésil les 1% les plus riches gagnent 100 fois ce que gagnent les 10% les plus pauvres, que la tranche maxi de l’impôt sur le revenu est de 27% (40% en France), qu’il n’y a pas d’impôt sur les revenus financiers des personnes physiques, quasiment pas sur l’héritage, etc. Ce qui fait dire à certains que le Brésil est une sorte de paradis fiscal…

Directeur d’étude à l’institut de recherche économique appliquée (IPEA) de Brasilia, André Calixte explique les origines de ces inégalités : “Après l’abolition de l’esclavage, en 1888, le Brésil n’a pas eu de véritable réforme agraire. On a fossilisé les inégalités de richesses qui sont aussi des inégalités de genre et de race”. Du Piketty pur jus.

Certes Lula da Silva a sorti 25 millions de personnes de la misère mais depuis deux ans la situation s’est gravement détériorée. L’inflation est à 11%, le chômage en forte hausse, le PIB en chute de 3,5 % sans compter la crise politique qui agite le pays avec les scandales de corruption qui font les choux gras des journaux TV de O globo tous les soirs. Il n’est même pas certain que la présidente, Dilma Rouseff, puisse terminer son mandat.

Bref, le Brésil va très mal et même les PIche s’en rendent compte !

Déjà à Paraty, ils avaient été frappés de constater que les hélicoptères des riches de Sâo Paulo venus passer le week end dans ce petit paradis en bord de mer, rentraient un peu plus tôt en ville (Sâo Paulo compte 300 héliports contre “seulement” 60 à New York). Ah ! Ma bonne dame, il y a bien de la misère dans ce pays.

Lorsqu’ils voient ce qu’ils voient, qu’ils entendent ce qu’ils entendent, qu’ils lisent ce qu’ils lisent, les Piche sont bien contents d’être venus ici depuis un pays à la pointe du progrès social, de la lutte contre les inégalités et en croissance économique.

Il s’agit bien sûr de l’Uruguay d’où ils ont franchi la frontière vers le Brésil.

Honni soit qui mal y pense…

A bientôt

Du sexe des anges…

4 mars 2016

11 h du soir, les grilles des échopes sont cadenassées, les rideaux de fer baissés, les maisons à moitié finies succèdent à celles à moitié en ruine, des gens sont affalés sur le trottoir, la rue est à peine éclairée. Le bus file mais la vision reste la même. Les Piche sont ébahis devant une telle misère.

Après un long moment, ils parviennent au centre historique de Salvador.

Changement radical de décor.

Autour de Rose et de Raoul qui arrivent de l’aéroport en provenance de Brasilia une foule dense, des musiques qui s’entrechoquent, des vendeurs ambulants, des quémandeurs, des kiosques de boissons et de nourritures, des taxis, des policiers avec gilet pare-balle et pistolet au côté. Des projecteurs illuminent les superbes bâtiments alentour.

Avec leurs bagages sur le dos, les Piche ne se sentent pas vraiment dans la note. Une chose est sûre : ils ne sont plus à Brasilia ! Salvador Brasilia deux villes aux antipodes l’une de l’autre.

Très vite Rose et Raoul qui hésitent sur leur chemin sont entourés de conseillers-quémandeurs-emmerdeurs. Ils décident de ne pas poursuivre à pied vers leur hôtel pour ne pas être suivis dans les petites ruelles qu’ils doivent emprunter et sautent dans un taxi pour finir leur trajet.

Le premier contact avec Salavador est rude.

- “La première impression est toujours la bonne. Surtout quand elle est mauvaise”, rappelle Raoul à Rose qui espère bien que cette citation ne soit rien d’autre qu’un bon mot.

Après plusieurs jours, leur perception de la ville est plus contrastée. Clairement, Salvador ne ressemble à aucune autre ville du Brésil. Elle est débordante de vie. Dans tous ses excès. La musique omniprésente est forte, l’alcool y est fort, les voix et les personnalités y sont fortes. Première capitale du Brésil, principal lieu d’arrivée des millions d’esclaves venus d’Afrique, Salavador a conservé, perpétué, magnifié des pratiques, des arts et des croyances venues du Bénin et du Nigéria. Le Museu Afro Brasileiro en porte témoignage tout comme le musée du Bénin en plein Pelourinho, le lieu de vente des esclaves.

Pour ce qui est de l’art, les Piche sont preneurs mais pour les croyances ils ne sont pas clients. Le rabatteur qui voulait leur vendre une séance de Candomblé (hystérie collective mettant en jeu les Orixas des esprits qui, que …) s’est fait renvoyer dans ses buts.

Les Piche qui ne sont pas non plus trop clients de la religion dominante ont tout de même visité quelques unes des 365 églises (oui, oui, une par jour) que compte la ville. La plus célèbre, igreja Sâo Francisco, est aussi la plus laide intérieurement. Des boursoufflures dorées du sol au plafond, pas un centimètre carré sans sa feuille d’or ! Toutefois, cette visite a permis aux Piche de trancher une question qui les taraude depuis des années (et ils ne sont pas les seuls) : quel est le sexe des anges ? La réponse est là, à Salvador de Bahia, sur les murs de cette église. Les sculputres des anges ont toutes un sexe bien visible et il est masculin. Dans les autres églises un élégant drapé cache la chose. Cette stupéfiante découverte conduit Rose à un début d’induction mêlant église, anges masculins, petits garçons, tribunaux… qui, pour Raoul, manque un peu de rigueur.

A l’extérieur de ce nid à richesses ostentatoires, des pauvres attendent les visiteurs sur le parvis. Plus que des pauvres. Des êtres détruits par le crack et l’alcool qui tentent de trouver pour trois sous de survie. Les Piche ne cesseront de les croiser dans les rues du centre historique, tentant leur chance auprès de la moindre personne passant à portée de main. Un bus specialisé, très équipé, porte écrit sur son flanc “Le crack peut être vaincu”. A l’instant où Raoul photographie ce bus, un de ces pauvre hère passe dans le champ comme pour démentir le slogan volontariste.

Le coeur de Salvador avec ses maisons des XVIII et XIX siècles est magnifique, c’est lui et ceux qui animent ces quartiers, sans y habiter, qui drainent des millions de touristes chaque année.

Pour Rose et Raoul, le séjour prend une autre saveur. Venus à Salvador il y a trente deux ans en voilier depuis la France, ils sont là en pélerinage. Ils traquent les lieux qui ont compté à cette époque.

Pour eux ce modeste restaurant derrière l’ascenceur Lacerda, c’est le fameux “restau des putes”, leur cantine d’alors ! La fontaine qui offre généreusement et gratuitement de l’eau de source à Itaparica, l’île en face de Salvador, continue son office (depuis 1848 !). Elle leur servait à faire les pleins du bateau. De l’eau de source ! Un vrai bonheur. En revanche, la pléïade de voiliers qui mouillaient à l’abri de l’île n’y sont plus. Une modeste marina a poussé là.

Rose et Raoul ont tout de même rencontré un de ces fous de la mer qui vit encore sur son voilier. Ils ont eu des tas de choses à se dire autour d’un verre de caipirinha (alcool de canne à sucre, sucre de canne, citrons verts, glaçons, LA boisson d’ici). Les uns et les autres ont retrouvé le réflexe qui consiste, avant de s’asseoir, à regarder sous la table s’il y a quelques bouteilles de bière. L’habitude veut que pour éviter toute contestation, les consommateurs placent là les bouteilles au fur et à mesure qu’ils les vident. L’addition sera pour vous s’il en reste d’avant votre arrivée.

Signe du ciel (humm, humm), une pluie diluvienne s’abat ce matin sur la ville. Il y a trente deux ans c’était le moment pour la famille Piche de monter sur le pont pour prendre une douche d’eau douce et fraîche. Aujourd’hui, c’est celui de rester cloîtré dans une chambre d’hôtel. Heureusement, avec vue sur la baie “de tous les saints”  (”Bahia de todos os santos”).Tout de même.

A bientôt

PS Les Piche profitent de ce texte pour adresser un salut amical à ceux avec qui ils ont partagé de si bons moments, ici, dans la baie de Salvador, il y a trois décennies. Salut donc à Héphaïstos, Nuage, Dulcimer, Galopin, Chiloé, Maïo, Carpe Diem, Algorithme…

Alerte

1 mars 2016

5h10 du matin. Les occupants des 15 étages de l’hôtel Dos Americas de Brasilia sont tous réveillés. Le hurlement des sirènes alerte incendie ne leur laisse aucune chance de poursuivre leur nuit.

En moins de temps qu’il n’en faut pour enflammer une botte de paille, Rose est habillée, sac sur l’épaule prête à quitter sa chambre. Impressionné par cette rapidité, Raoul qui traînait un peu se presse à son tour. Bien sûr, les ascenceurs sont hors service. Par chance, la veille, les Piche ont quitté une chambre au 10 ème pour une autre au 4 ème. Six étages de moins à descendre. Ils rejoignent la foule des clients à l’extérieur de l’hôtel. Ni flamme, ni fumée mais au rez de chaussée une employée qui farfouille dans une armoire électronique. Pour Raoul, furax, la cause est entendue, il s’agit d’une fausse alerte. La suite lui donnera raison.

Fort de leur précédente expérience ratée de piétons brasilianesques, les Piche prennent désormais assez souvent le taxi lorsque les distances s’allongent. Ils notent qu’à chaque fois, le taxi part dans la direction opposée à la destination, effectue un tour de pâté d’immeubles, emprunte une ou deux bretelles de voie rapide pour prendre le bon cap, file bon train avant de sortir par une nouvelle bretelle qui le conduit à la rue finale.

Raoul fait remarquer à Rose que ces trajectoires tarabiscotées ressemblent fort à celles d’un avion en approche d’un aéroport pour atterissage.

- Pas étonnant, réplique Rose. Tu as vu le plan de la ville ? C’est exactement celui d’un avion. L’Eixo Rodoviario (l’axe est-ouest), c’est le fuselage, l’Eixo Monumental (l’axe nord-sud) les ailes. Un avion de 12 km sur 12…

- Je trouve que cela ressemble plutôt à un colibri, façon lignes de Nasca, répond Raoul.

- Si tu veux. On peut tout imaginer à Brasilia : les arches du pont JK forment un parfait monstre du Loch Ness ; la pente qui entoure le dôme du musée national est évidemment un anneau de Saturne ; la pyramide du théâtre national une rampe de skate board ; le dôme de l’asssemblée nationale une parabole TV. etc.

Effectivement, il y a de la magie dans cette ville pour qui veut bien se laisser porter par son imagination.

Il arrive aussi que le hasard en rajoute un peu dans le merveilleux. Tel cette répétition d’une pièce de Haydn par un orchestre de musique classique dans l’église Dom Bosco baignée par la féérique lumière bleue de ses 80 vitraux lorsque Rose et Raoul la visitent. Une harmonie parfaite entre musique et architecture.

De quoi faire oublier la stridence d’une sirène d’alarme incendie.

A bientôt

Brasilia, la vie malgré tout

27 février 2016

La plupart des métropoles cherchent comment sortir la voiture de la ville. Il y a 50 ans, Oscar Niemeyer, l’urbaniste Lucio Costa et le paysagiste Burle Marx ont trouvé, eux, en concevant  Brasilia, comment sortir le piéton de la ville ! Pour cela, ils ont créé des espaces verts tellement immenses qu’ils ne peuvent pas être parcourus à pied. D’autant moins qu’ils sont transpercés par d’innombrables voies de circulation.

Les Piche ont fait l’angoissante expérience de cet étrange urbanisme.

Au sortir du Congrès National (les deux paraboles et les tours jumelles connues du monde entier), ils se mettent en route, à pied, vers le pont JK, assez éloigné, un ouvrage remarquable. Ils suivent un trottoir qui longe une avenue bordée d’un côté par le palais de la présidence de la république et de l’autre par une vaste place. Puis les bâtiments disparaissent et seul subsiste un vaste espace boisé. Le trottoir devient piste cyclable puis chemin puis sentier puis plus rien. Pas un être humain visible, uniquement la verdure, les voies rapides, les voitures. Pour continuer leur chemin les Piche devraient traverser  une double voie qui fusionne avec une triple voie puis au-delà du terre plein central, à nouveau une triple voie et une double voie. Soit 10 voies de circulation à franchir au milieu d’un flot ininterrompu de véhicules. Du suicide ! Ils renoncent donc, changent de cap, marchent dans l’herbe et tentent de trouver leur salut à un feu de circulation, espérant qu’un taxi s’immobilisera là et qu’ils pourront s’y engouffrer. Pari gagné ! Ouf, une taxiteuse sera leur sauveur.

Heureusement, Brasilia ce sont aussi et surtout des créations architecturales hors du commun. Elles n’ont pas pris une ride, ni ne se sont démodées. Géniales elles étaient, géniales elles sont restées.

Trois d’entre-elles ont particulièrement subjuguées les Piche : le palais Itamaraty, siège du ministère des affaires étrangères, l’église Don Bosco et la cathédrale. Ces deux dernières, belles de l’extérieur, le sont mille fois plus encore vues de l’intérieur grâce aux extraordinaires vitraux qui inondent cet intérieur d’une lumière bleu océan.

De même, le palais Itamaraty, avec ses vastes salles de 2000 m2 sans pilier de soutien, agrandies encore par un étonnant jeu de miroirs noirs et par leurs ouvertures totales sur l’extérieur est  bien plus étonnant de l’intérieur que de l’extérieur.

Les jours passants, Rose et Raoul ont fini par trouver, ici une marchande de plats familliaux à savourer assis sur un banc, à l’ombre des arbres, là un café avec des chaises à l’extérieur et un chanteur qui accroît le plaisir de déguster une caipirinha. A Brasilia, par endroits, entre les blocs des immeubles ministériels, l’herbe folle a poussé, la vie aussi.

A bientôt

Au nord de Rio, la Suisse

25 février 2016

Rose le croyait plus simple. En fait, Raoul est un peu snob. Prétextant qu’à Rio de Janeiro la chaleur est étouffante il décide d’aller dans les montagnes du nord de la ville à l’instar de l’empereur du Brésil cent cinquante ans avant lui. Cap donc vers Petropolis où Pedro II construisit son palais pour vivre au frais.

Raoul se rue au dit palais. Mais il est un peu déconfit lorsqu’un gardien lui intime d’enfiler des patins pour ne pas abimer le parquet. Raoul passe donc une heure à astiquer les sols du palais de Pedro II. Quel manque de chic !

Le lendemain, il poursuit sa tournée impériale à Teresopolis (ville de l’impératrice Tereza). Là, sa lubie est d’aller voir le “Dedo de Deus” (le doigt de Dieu) ce qui lui attire les moqueries de Rose. Le doigt de Dieu est un étroit pic rocheux vertical, très allongé qui pointe vers le ciel à 1700 m d’altitude. Raoul découvre que la rando qui permet de le découvrir est formée d’une montée non-stop d’une heure, sur une pente super raide. Il souffle, transpire tant et si bien que, parvenu au sommet où se découvre le majestueux pic, Rose ne peux s’empêcher de lâcher à Raoul : “Tu le vois le doigt ? Ce n’est pas le doigt de Dieu, c’est le doigt que Dieu te fait !”.

Petropolis, Teresopolis puis Nova Friburgo autant de villégiatures des riches Cariocas qui se sont emparés des maisons des Suisses (surtout) et des Allemands chargés de coloniser la région au XIX ème siècle parce que le climat y est proche de celui de leurs pays d’origine.

Un siècle plus tard, les maisons et les châlets d’inspiration helvète abondent encore dans les magnifiques montagnes de cette contrée. Les vaches aussi.

Les Piche visiteront même “La crèmerie”, encore dénommée “La ferme de Genève” (en français dans le texte) qui produit crottin, pyramide, boursin, brique etc. Ils caressent les chèvres en train de manger de fins bambous, en suivant les explications du créateur de l’exploitation, un solide vieillard de plus de 85 ans. Il leur raconte notamment, comment sa grand-mère genevoise lui a transmis les recettes des fondues.

Quant aux yeux bleus, fréquents ici, dans un pays pourtant si métissé, il ne sont pas rares.  Influence germanique plutôt que suisse ?

A l’apéritif, les Piche se voient servir des saucisses grillées là où d’autres proposent des cacahuètes. Il n’y a pas que des bienfaits à la colonisation…

A bientôt

Rose “the girl from Ipanema”

21 février 2016

Raoul la croyait plus simple. En fait, Rose est un peu snob. Pour laver son linge, elle l’amène à Copacabana. Elle le met dans le tambour de la machine et part se faire rouler dans les déferlantes qui explosent tout au long de la plage. Cela juste en face du “Copacabana Palace”. A 14 h 30 elle quitte l’endroit et met le cap sur Ipanema où elle devient “the girl from Ipanema”. Ces détails de la vie quotidienne prendront un relief particulier le lendemain, à la lecture des journaux comme on le verra plus loin.

Depuis quelques jours, les Piche parcourent Rio dans tous les sens. Ils y voient le pire comme le meilleur.

Ici d’interminables banlieues aux sites industriels en ruines, là de superbes maisons coloniales, défigurées au rez de chaussée par des commerces bas de gamme, ailleurs des quartiers huppés et au-dessus d’eux, très au-dessus, des favelas construites sur des pentes si raides qu’elles semblent attendre le premier orage pour partir en glissade. Dans le centre historique, le quartier des bureaux grouille de monde dans des rues étroites à l’heure du déjeuner.

La beauté de Rio de Janeiro tient au site extraordinaire dans lequel la ville est construite. C’est du sommet du Corcovado que l’on s’en rend compte, la vue est à couper le souffle. Un spectcle unique. Paradoxalement, le second lieu qui montre toute la beauté du site de Rio ne se trouve pas à Rio mais à Niteroï de l’autre côté de la baie de Guanabara. A Niteroï, l’alignement est parfait : l’étonnant musée d’art contemporain conçu par Oscar Niemeyer posé sur une pointe rocheuse fait face au pain de sucre, au Corcovado, à la baie et à la ville de Rio.

Autre coup de coeur des Piche, le sublime “Museu d’amanha” (”Musée de demain”) qui vient d’ouvrir ses portes. Un extraordinaire bâtiment futuriste sensé représenter un Churinga aborigène (les plus motivés chercheront ce qu’est un Churinga !)

Bref, Rose et Raoul trouvent Rio de Janeiro variée au possible, passionante mais difficile.

La sécurité  pour les visiteurs étrangers ?

-  Un Allemand a été tué il y a un an.

- Un professeur péruvien, lundi dernier. Il était sorti promener son chien à 15h dans un quartier plutôt chic. “Le chien a été retouvé vivant”, précise le journal.

- Une touriste argentine, le mercredi suivant. A Copacabana, face au “Copacabana Palace”, exactement là où Rose se faisait rouler dans les vagues, 12 heures plus tôt.

A bientôt

PS : Rose tient à préciser que se baigner à Copacabana à 2 h de l’après-midi, ce n’est pas du tout pareil que d’y boire des bières à 2 heures du matin avec des copines. C’est toute la différence entre la prudence et l’imprudence. Elle reproche à Raoul de faire des rapprochements injustifiés pour dramatiser le récit. Raoul, estime, lui, qu’il est normal de “faire saigner la tomate”.  Chacun appréciera.

Le risque zéro n’existe pas. Le Zica si.

16 février 2016

- Tu as vu que l’épidémie de Zica s’étend au Brésil. Exactement dans les régions où tu m’amènes.

- Humm

- Tu te souviens du tremblement de terre au Costa Rica ?

- Humm

- Et de notre hôtel qui s’est écroulé à Buenos Aires ?

- Humm

- Et de l’incendie à Mexico ?

- Humm

- Et de l’alerte Tsunami en Australie ?

- Humm

- Et de la révolution, place Tahir au Caire ?

- Humm

- Raoul parfois je me demande si tu ne me portes pas la poisse.

- Mais qu’est-ce que tu racontes. Tu as vu les informations ? Un orage de la force d’un ouragan s’est abattu sur Porto Alegre…

- Et alors ?

- Alors, cela s’est produit juste le jour où nous avons quitté cette ville ! Au contraire, je crois que je te porte chance.

-  Demain tu as prévu que nous prenions un bus pour Trindade. Il a tué 15 touristes, il y a 5 mois et deux de plus il y a deux mois. Tu es bien sûr de nous porter chance ?

- Mais oui, tout va bien se passer. Tout de même, tu as pris le répulsif à moustique ?

- Pour aider la chance ? Oui je l’ai pris.

A bientôt

PS : Aux dernières nouvelles, les Piche sont revenus intacts de Trindad, où ils ont découvert Cachadaçao une des plus belles plages du Brésil. Ca valait la peine de prendre le risque, non ?

La plage idylique existe

14 février 2016

La plage idylique existe.

Elle se trouve au creux d’une large baie, entourée de montagnes boisées, terminée à ses extrémités par de gros rochers lisses et ronds qui forment une piscine naturelle. L’eau fraîche d’une cascade finit son cours en serpentant au milieu du sable blanc où elle creuse son lit avant de rejoindre la mer.

La brise qui se lève à midi ajoute à la fraîcheur de l’ombre des arbres qui bordent le haut de la plage. Sous cet ombrage une modeste paillote propose trois tables et quelques chaises et sert des boissons locales. Une noix de coco décapitée avec une paille plantée à l’intérieur et l’on déguste le jus de fruit le plus naturel du monde.

L’eau douce de la cascade, captée par un petit tuyau, tombe en douche pour rincer les rares baigneurs.

La mer est animée de rouleaux complaisants qui s’achèvent sur l’estran en le zébrant des lignes blanches de leur déferlement.

Pas de construction, pas de route d’accès, seulement un chemin escarpé et glissant, mal commode. Le modeste prix à payer pour découvrir ce lieu.

Oui, les Piche ont passé une excellente journée. Merci.

A bientôt

Serra Verde Express, un Express pas trop pressé

13 février 2016

Il y a très peu de trains au Brésil. Aussi, les Piche ne veulent pas rater l’occasion d’en emprunter un : le Serra Verde Express, 64 km à travers des montagnes couvertes d’une forêt tropicale, à franchir des viaducs, des tunnels, à longer des lacs, des cascades, etc.

Le mot “Express” est sans doute excessif.

A 8h pile, le train s’ébranle, la précision d’un TGV. Sur les 5 premiers mètres la même vitesse que le TGV. Au-delà, Le Serra Verde Express marque sa différence. Les Piche s’en rendent compte lorsqu’ils voient les cyclistes dépasser le train.

- C’est parce que nous sommes en ville, sentence Raoul. Après il va accélérer.

Pas du tout. Sorti de la ville, à la première côte, il ralentit ! Un coureur à pied le dépasserait. Mais de coureur à pied il n’y a point, car le passage de la voie au milieu de la forêt est si étroit que les branches fouettent les fenêtres des wagons. Raoul doit tenir fermement son appareil photo pour ne pas se le faire arracher par l’agresseur végétal.

Au détour d’un virage, les Piche découvrent un panorama grandiose. Un précipice sur leur gauche (normal, c’est dans l’air du temps…), au loin une vallée encadrée de hauts sommets couverts de forêts avec ici et là des cascades inatteignables.

Les heures passent, le spectacle est permanent.

Bien que sa vitesse ne le laisse guère supposer, le train descend de 900 m au niveau de la mer. Conséquence, la température, elle, monte, monte, monte. Après 4h de parcours à la fabuleuse moyenne de 16 km/h, le train arrive enfin à destination. Les Piche sont ravis mais ils sont cueillis par une chaleur épouvantable car à la perte d’altitude s’ajoute les caprices d’El Nino capable de faire monter la température à 38° voire 40°. Or ces jours-ci El Nino pique sa crise.

Après une rapide visite du bourg où ils se trouvent, Il ne reste plus aux Piche qu’à envisager le retour.

Ils bénissent cette femme qui la veille leur a conseillé de ne pas prendre le train pour revenir car “au retour le train va moins vite” ! Les Piche doutent que cela soit possible mais ils n’ont pas envie de le vérifier. Ils prennent donc un bus qui les ramène à leur point de départ dans le quart du temps pris par l’”Express”.

Plus performant, le bus, sans aucun doute mais bien moins spectaculaire.

A bientôt

Drôle de carnaval

10 février 2016

Les Piche sont dans un de ces fameux bus longs de Curitiba lorsque, à l’arrêt de l’hôpital Nostra Senhora de la Piedad, une femme et un homme montent à bord. Rose sursaute et alerte Raoul :

- Mon dieu (elle qui n’en a pas), quelle horreur ! Tu as vu cette femme ? Elle a le visage tout sanguinolant, comme écorché vif ! C’est fou, on ne quitte pas l’hôpital dans cet état, on y entre plutôt.

- Tu as remarqué, lui répond Raoul, son compagnon est dans le même état. En plus ils rigolent tous les deux !!

- Ce n’est pas possible c’est du faux. Mais bien sûr ! Nous sommes au second jour du carnaval. Incroyable tout de même comme déguisement.

Une demi-heure plus tard, Rose et Raoul arrivent à la grande rue piétonnière du centre ville et là, le choc. Le spectacle qu’ils ont sous les yeux serait inimaginable en France. La foule est constituée de personnes aux visages et aux corps éclatés, meurtris, couverts de sang. Plus gore, tu meurs… Certains portent des armes factices (mal imitées) et pour que nul ne se méprenne, un homme tout de noir vétu brandit la grande faux.

Les grimages et les déguisements sont si réalistes qu’ils en sont insupportables. Seuls quelques participants ont pris le parti d’une recherche esthéthique plutôt que choquante. Finalement, les Piche découvrent que le thème du jour est les “zombis”. Pour Rose et Raoul c’est plutôt “Bataclan”.

La veille, le défilé auquel ils avaient assisté était nettement plus pépère. Parmi les groupes, deux ont particulièrement retenus leur attention. Celui de la CGT locale qui chantait et dansait pour dénoncer le “massacre du 27 avril” date d’une manifestation durement réprimée par la police. La même police chargée de protéger le défilé. (précisons que le “massacre” du 27 avril n’avait fait ni mort ni blessé).

Et puis il y a eu un groupe très coloré, très gai, très vivant, le plus applaudi de tous, uniquement composé de papys et de mamys !

Cela a ragaillardi les Piche auxquels les jeunes cèdent systématiquement les places réservées aux vieux dans les fameux autobus longs de la ville.

A bientôt

Les Piche au régime brésilien : 15 fruits au petit déjeuner

4 février 2016

Pour le dépaysement, le Brésil ce n’est évidemment pas l’Afrique, ni l’Asie ni même l’Amérique centrale. Néanmoins, pour les Piche les motifs de surprise ne manquent pas.

Le premier qui les met en joie dès le matin, est le petit déjeuner brésilien. Le mot “petit” ne convenant pas du tout.

Il s’agit d’un hallucinant buffet qui offre une myriade de fruits frais, de jus de fruits, de yaourts aux fruits mais aussi des variétés de pains, de gâteaux et comme si cela ne suffisait pas du jambon, du fromage, de l’omelette, des saucisses, etc… sans oublier le café brésilien. A volonté. Et de la volonté, Rose et Raoul n’en manquent pas.

Puisqu’on est dans le registre alimentaire, restons-y.

Depuis Porto Alegre, les Piche sont fanas des restaurants “au kilo”. Autrement dit, des restaurants qui proposent de copieux buffets et où l’on paye en fonction du poids de ce que l’on a mis dans son assiette. Il est ainsi possible de déjeuner (plus rarement de dîner) très correctement pour 5  à 7 euros seulement.

Autre fonction essentielle du quotidien des Piche voyageurs, les déplacements.

Rose et Raoul aiment se déplacer avec les bus de ville et non pas en taxi. Pas toujours facile de s’y retrouver mais c’est un jeu agréable parce qu’il conduit fréquemment à se tourner vers les indigènes, unanimement serviables et coopératifs. A Curitiba le système de bus est de renommée mondiale. A juste titre. Le réseau a été créé dans les années 70 lorsqu’un nouveau maire à voulu inverser la tendance urbanistique de l’époque qui consistait à ouvrir les villes aux voitures comme à Los Angeles.

Faute de moyens pour doter la ville d’un métro ou de lignes de tramways, il a “inventé” un métro de surface à base de bus de très grande capacité conçus spécialement à sa demande par Volvo. Ces long bus, articulés par deux soufflets, emportent plus de 200 passagers. Ils s’arrêtent à des quais d’embarquement abrités, en forme de gros tubes qui sont au même niveau que le plancher du bus. L’embarquement et le débarquement sont donc aisés et rapides. Des élévateurs permettent aux personnes handicapées d’accéder au quai et ensuite d’entrer dans le bus sans nécessiter d’aide. Des voies sont réservées à ces bus qui passent toutes les 5 minutes. A Curitiba, deux millions de personnes prennent le bus chaque jour.

Ce n’est pas la seule particularité de cette ville étonnante pour ceux qui ont en tête l’image des mégalopoles brésiliennes agitées, stressantes, criminalisées et criblées de pauvreté. Curitiba est une ville plutôt paisible pour comporter 1,8 million d’habitants. Le niveau de vie y est élevé et les préoccupations sociales et de “bien vivre” y sont manifestes. Le fameux maire a multiplié les places, a planté des millions d’arbres, ouvert des rues piétonnes, organisé le ramassage des déchets. Bref, il a fait d’un univers de béton quelque chose de vivable. Il a constamment été réélu…

La culture y tient une place importante.

Les Piche se sont rués sur le joyau de la ville : le musée d’art contemporain Oscar Niemeyer. Un bâtiment de béton et de verre en forme d’oeil dans le style années 60 du maître. Superbe, avec de nombreuses expositions dont certaines éblouissantes quasi au sens propre. Raoul a pris des photos qu’il montrera peut-être un jour.

Dernier agrément de Curitiba que les Piche apprécient au plus au point, la ville se situe à 930 mètres d’altitude, la température y est donc moins chaude qu’ailleurs. De toute façon, de ce côté-là les choses se sont bien arrangées pour Rose et Raoul. Depuis qu’ils ont grillé sur une plage de Florianopolis le temps s’est mis au gris et à la pluie. Du coup, de rouge façon homard thermidor, ils évoluent gentiment vers un joli brun gâteau sec.

A bientôt

“Les Bidochons en vacances”

31 janvier 2016

En franchissant la frontière du Brésil, pour les Piche tout a changé.

D’abord, ils sont devenus Uruguayens. Dès qu’ils parlent, on leur renvoie un “ah! vous êtes Uruguayens !” qui les ravit. Cela leur laisse à penser que leur espagnol, qu’ils utilisent à la place du brésilien, n’est pas si mauvais. Le brésilien, cette langue si chantante, est précisément le deuxième grand changement. Face aux difficultés des Piche pour échanger dans cet idome, Rose a posé un diagnostic sans appel “lorsqu’ils (les Brésiliens) parlent, je comprends la musique mais pas les paroles”. En habillant leur  vocabulaire espagnol de “ou”, “oum”, “oïs” les Piche parviennent à se faire comprendre mais le plus souvent ils ne comprennent pas les réponses à leurs questions.

Le troisième changement, ce sont les vacances. C’est le plein été et les Brésiliens sont sur les plages. Notamment à Florianopolis. Sable blanc, fin, eau turquoise et chaude, parasols, marchands ambulants, familles… Les Piche qui se sont joints à eux ne sont plus les Piche en voyage mais “Les Bidochons en vacances” ! Repliés sous leur minuscule parasol, ils essayent de ne pas virer au rouge façon homard thermidor.

Raoul a l’impression de revenir 60 ans en arrière à Carnon plage, à une différence près qui, encore une fois, change tout : les culs ! Ici les culs sont nus ou quasiment, tant les strings des dames et des demoiselles ne cachent rien de leur anatomie.

Raoul s’adapte. Sans difficulté.

A bientôt

PS : Les Piche ont échoué ils sont rouge thermidor

Les Uruguayens, drôles de citoyens ?

26 janvier 2016

A Montevideo, les Piche sont perplexes. Que penseraient les Français, si :

- Pour se conformer au principe de séparation des églises et de l’Etat, on changeait les appellations des jours fériés nationaux issus des fêtes catholiques et qu’on les remplace par ” le jour de la famille” pour Noël, ” La semaine du tourisme ” pour la semaine de Pâques, “la journée des plages” pour l’Ascencion.

- On accueillait des réfugiés syriens en leur attribuant une aide égale à 2 fois le revenu minimum.

- On vendait le canabis en pharmacie et on autorisait des clubs d’amateurs à en cultiver pour leur consommation personnelle. Histoire de couper l’herbe (hi, hi) sous le pied des trafiquants et de réduire la criminalité.

- Un juge refusait la diffusion des portraits de braqueurs pris par les caméras de surveillance d’une banque au nom de la présomption d’innocence. Et aussi pour ne pas violer le loi sur la protection des mineurs “au cas où les personnes filmées se révèleraient être des mineurs”.

- On choisissait comme capitale une ville avec des dizaines de km de plages depuis le centre jusqu’à la périphérie, longés par une superbe et interminable promenade piétonière.

Les Piche s’interrogent, mais pas les Uruguayens pour lesquels tout cela est réalité chez eux.

A Bientôt

PS Bien sûr ceci n’a aucun rapport avec cela mais les Piche notent que l’Uruguay a un des plus haut niveau d’instruction des pays d’Amérique latine.

Destins croisés

24 janvier 2016

- Hola ! jeune homme, viens voir là. Comment t’appelles-tu ?

- Ernesto, Monsieur.

- Tu habites par ici ?

- Oui, à quatre rues de là.

- Tu aimes la musique ?

- Oui, mais je préfère la lecture et le sport

- Très bien, très bien. Continue et tu réussiras.

- Et vous, Monsieur, comment vous appelez-vous ?

- Manuel, mon garçon.

- Vous aimez beaucoup la musique, j’imagine ?

- C’est ma vie.

- Merci, au revoir Monsieur.

- Adieu petit.

Le vieil homme et le jeune homme se quittent sur cet adieu, réciproquement impressionnés par la force qui émane de l’un et de l’autre.

Nous sommes en 1946 dans la bourgade d’Alta Gracia, perdue au centre de l’Argentine. La famille d’Ernesto s’est installée ici parce qu’il souffre d’asthme. Manuel y est venu pour la tranquillité du lieu. Il mourra dans son lit quelques mois après cette rencontre. Ernesto, 21 ans plus tard, d’une rafale de mitraillette.

Tout deux connaîtront une célébrité mondiale. Manuel de Falla pour ses compositions musicales, Ernesto Guevarra pour sa luttre contre l’oppression des peuples.

Cette rencontre n’a jamais eu lieu mais elle aurait pu. Elle a été imaginée par Raoul Piche après la visite à Alta Gracia des maisons musées de Manuel de Falla et d’Ernesto Guevarra et constaté qu’ils y vécurent durant quelques années au même moment à quelques rues de distance.

A bientôt

Rencontres du troisième type

23 janvier 2016

Modeste par l’altitude, le mont Uritorco est pourtant de première importance pour l’humanité.

C’est là, à une centaine de kilomètres au nord de Cordoba que viennent régulièrement nous rendre visite des extraterrestres.

De nombreux témoignages en font foi.

Le premier remonte à 1935. Plus récemment, en 1986, Gabriel et Esperanza Gomez ont vu un vaisseau spatial si grand qu’il illuminait tout le paysage environnant. Le lendemain, le sol était brûlé sur 122 m de long et 64 m de large à l’endroit de l’”atterrissage”. Quelques années plus tard ce sont 300 personnes qui ont vu un vaisseau ayant laissé également une grande marque roussie. Rebelotte en 1991.

Chaque année, 100 000 personnes grimpent sur les flancs du mont Uritorco dans l’espoir d’une rencontre du troisième type.

Les Piche ne pouvaient pas manquer un tel rendez-vous. Ils se sont donc rendus au “centre d’information sur les OVNI” de Capilla del Monte, la commune au pied du mont. Tous les documents et les témoignages sur les événements y sont rassemblés.

Parmi les théories émises pour justifier ces phénomènes, Rose déclare à Raoul que sa préférence va nettement vers celle-ci :

Les extraterrestres visitent le mont Uritorco parce que le chevalier de Perceval y aurait apporté le saint Graal et la croix des Templiers à la fin du XII ème siècle pour les poser à côté du sceptre, réalisé 8000 ans auparavant par Vatan chef des Comechingones, la tribu indienne qui peuplait la région.

Inquiet, Raoul demande à Rose pourquoi cette explication retient sa faveur.

- J’aime bien cette explication car elle montre à quel point les gens qui croient à ces fadaises d’extraterrestres ont l’esprit dérangé. Pour écrire des trucs pareils il faut vraiment être “azimuté” (une expression chère à Rose pour qualifier quelqu’un qui a perdu le nord).

Raoul est rassuré mais de retour à Cordoba la rationalité des Piche est à nouveau mise à l’épreuve.

A la foire artisanale du quartier bobo de Güemes des vendeurs proposent des pyramides censées concentrer l’orgone, cette énergie chère à Wilhem Reich que la physique ignore. Elle transforme “l’énergie négative en énergie positive, purifie les émotions et protège des mauvaises radiations”.

Face au regard plus que dubitatif de Rose, Raoul propose une alternative (c’est le cas de le dire, on va comprendre…).

- Pour obtenir le même résultat, il suffit de mettre les doigts dans une prise de courant qui passe 50 fois par seconde du positif au négatif (60 aux Etats Unis !) pour vivre des émotions fortes qui irradient joyeusement tout le corps au point de le faire se trémousser. Et, avec un peu de chance on peut, en prime, voir des éléphants roses venus de la planète Edé F.

Le manque de spiritualité et de sens poétique des Piche est consternant.

A bientôt

L’herbe roussie sur le lieu de l’”atterrissage”

La zone d’”atterrissage” vue de plus loin

La presse s’est emparé du sujet

Quand on vous dit que c’est lumineux !!!

Les Piche ont effectivement rencontré un extraterrestre à côté de sa soucoupe volante en plein centre ville de Capilla del Monte

La mairie lui paye le stationnement pour service rendu à l’économie de la ville. Des centaines de milliers de visiteurs chaque année.

Il a accepté de poser pour notre caméra. Oui, il a une apparence humaine mais il ne faut pas s’y fier…

Un bien bel engin. Pas aussi grand que dans les descriptions des témoins ? Et alors ? Incroyants !

Le mont Uritorco est en arrière plan

Raoul Piche découvrant le Saint Graal.

Dow Chimical, Dupont, Summit agro, Stinger, Gaucho… Les Argentins ont la main verte

18 janvier 2016

Que l’élevage argentin produise la viande la plus suave et goûteuse du monde, les Piche le savaient. Que les Argentins en consomment 8 fois plus par tête que les Etatsuniens, pourtant carnivores patentés, prêts à tout pour défendre leur beefstaek, les Piche s’en doutaient un peu. Au restaurant une tranche de faux filet de moins de 400 g ça n’existe pas.

Mais, en plus, les Piche découvrent que les Argentins ont la main verte.

Sur les 700 km qui séparent Buenos Aires de Cordoba, l’essentiel du paysage est formé de champs d’un vert absolu qui s’étendent à perte de vue. En revanche, Rose et Raoul n’ont pas bien compris les panneaux accrochés aux clôtures : Dow Chimical, Stinger, Dupont, Summit agro, Gaucho, Adama “simply groth together”, Systema full agro, Sinsem NS 5258, Pampero uso intensivo, Nidera (semillas, agrochimicas, fertilizantes), Polaverich inoculando liquido para maïz…  Sans doute des supporters des paysans.

C’est probablement avec leur aide que les Argentins sont devenus les deuxièmes producteurs mondiaux de soja et de maïs. Très forts !

De l’agriculture à la culture il n’y a qu’un pas que les Piche ont franchi le jour de leur arrivée à Cordoba en entrant dans le café “La real”. Dans cette salle rétro résonnaient les voix de Brel, Montand, Aznavour…

La culture comme l’agriculture s’exportent. Aussi naturelles l’une que l’autre ?

Conquête d’espace vital dans la carlingue d’un avion

13 janvier 2016

Tout voyage lointain commence par le partage de l’espace restreint d’une carlingue d’avion entre plusieurs centaines de personnes.
Un monde en réduction.
Pour les Piche allant vers Buenos Aires ce sont 13h30 à passer dans ce petit monde. Pour les autres aussi. Les instincts vitaux s’éveillent. Chacun lorgne sur les sièges vides qui lui permettra de s’allonger un peu. Raoul observe des prises de position stratégiques dans l’allée centrale forte de 4 sièges côte à côte. 4 sièges libres, c’est un lit, un château, un rêve. 3 sièges libres, c’est un peu de confort. 2 sièges, c’est un mauvais HLM, beaucoup préfèrent encore l’inconfort de leur siège unique qui ne doit rien à personne.
Avant le décollage, Rose quitte Raoul pour tenter sa chance ailleurs. Raoul se retrouve à une extrémité d’une rangée de 4, une femme à l’autre extrémité. Elle jette des coups d’oeil sur les deux sièges qui les séparent. Raoul fait de même. Derrière Raoul, un homme seul a pris position espérant conquérir les 4 sièges de sa rangée.
Décollage. Altitude de croisière. Première tentative de conquête territoriale. L’homme seul voit arriver une femme avec un bébé (l’horreur absolue, le bébé voyageur), elle vient nicher sur sa rangée. Tête du futur colon qui tente une opération de résistance déjouée par une autorité supérieure, celle de l’hôtesse de l’air. Il part à la recherche d’un nouveau territoire mais ne le trouve pas et revient chez lui.
Après le repas la très très longue nuit commence. C’est là que tout se joue.
Raoul croit à sa chance pour posséder trois sièges. Las, à son retour des toilettes, il trouve la femme d’extrême droite (hum !) couchée là où il croyait si bien s’étendre. Tant pis. Il regarde un film. Au mot fin, il tombe de sommeil. La femme s’est relevée, assise sur son siège. Raoul s’allonge. Plus tard il se relève et elle se couche. Finalement, tout au long de la nuit, ces deux-la vont partager leur territoire par périodes successives en bonne entente. Rose a moins de chance. Son voisin de rangée ne lui cèdera pas un pouce de terrain.
Derrière Raoul, pour des raisons mystérieuses, au milieu de la nuit , la femme s’exilera avec son bébé vers son siège d’origine. L’homme, enfin seul, restera allongé dans son château jusqu’au bout.
Dans la rangée côté hublot, à la hauteur de Rose, une femme visiblement adepte de la chirurgie esthétique portant moult bagouses grosses comme des balles de ping pong est nerveuse. Elle n’aime pas l’avion. Elle n’a pas confiance. Peut-être se demande-t-elle comme Jean Yanne “pourquoi n’a-t-on pas pensé à faire le fuselage des avions dans le même métal que les boîtes noires ?”. Raoul est tenté de la rassurer en lui faisant remarquer qu’elle peut faire plus confiance au pilote qu’à son chirurgien car dans l’hypothèse d’une erreur, le premier est bien plus sévèrement puni que le second. Mais réalisant qu’ils sont dans un avion de la Lufthansa, Raoul se ravise. Il pense que les passagers de la filiale Germanwing de la Lufthansa qui ont terminé leur voyage et leur vie sur les contreforts des Alpes françaises n’auraient pas apprécié le manque de rigueur de son raisonnement.
Du coup Raoul se sent coupable et un peu nerveux à son tour.
Lors du choc plutôt doux du train d’atterrissage sur la piste de Buenos Aires, la femme pousse un grand soupir de soulagement. Le pilote tenait à sa vie autant qu’à celle de ses passagers. Mais comment le savoir tant que les roues n’ont pas touché le sol.
Le monde en réduction d’un vol en avion ressemble décidément au monde réel. Désir de conquête, résistance, coopération, danger, incertitude, confiance, défiance ne s’y retrouvent-ils pas ?
A bientôt

La Confitería Ideal

23 février 2013

Carlos Gradel a chanté là, Maurice Chevalier y est venu tout comme Vittorio Gassman, des scènes des films « Tango » et « Evita » y ont été tournées. C’est dire si « La Confitería Ideal », café mais surtout haut lieu de rencontre des passionnés du tango, appartient à l’histoire de Buenos Aires.

Son style art déco du début du XX ème siècle l’a figée à cette époque. Colonnes de marbre, coupole de fer forgé, vitraux tchèques, percolateurs centenaires, services de cristal, lustres et appliques inondant la salle de bal de mille feux, en 2013 on est encore en 1912.

Même les danseurs qui évoluent sur la piste semblent d’époque. Là, un jeune couple, lui en pantalon trop ample, elle avec une longue robe et des chaussures à talons hauts et fins, enchaînent des passes savantes avec délice. Plus loin, un couple entre deux âges, lui tout de blanc vêtu, moustache et barbe au menton, entraîne une femme « embijoutée » dans une danse coquine.

Le haut des corps semble figé mais les jambes tournoient, se croisent, se frottent, s’entre-croisent, sont vivement jetées vers l’arrière puis s’écartent en ciseau vers la gauche, le couple se serre, se colle, s’écarte, tournoie, multiplie des pas qui lui font faire le tour de l’immense piste de marbre. La danseuse frotte son pied sur le pantalon du danseur, oh!

On retrouve les origines du tango, cette danse de malfrats qui sévissait à la Boca, le quartier du port où les machos immigrés italiens imposaient leur loi. Immigration massive qui a fait dire que « les Mexicains descendent des Aztèques, les Péruviens descendent des Incas, et les Argentins descendent… du bateau. »

Évidemment, c’est dans cette célébrissime « milonga » que Rose prend sa première leçon de tango. Même si le tango se veut danse d’improvisation, son apprentissage se révèle très technique : avant, pivot, écartement à droite, arrière, croisé, la gamme des pas de base est sans limite.

Après la grammaire espagnole voilà Rose qui apprend celle du tango. Pas si simple qu’elle le croyait. L’apprentissage durera plus que prévu. Raoul qui connaît ses limites plus que réduites en ce domaine, reste sagement à observer les lieux et les danseurs.

Après cette plongée dans le passé, les Piche se réjouissent que « La Confitería Ideal » n’ait pas été gagnée par la « mondialisation » comme bien d’autres lieux fameux de Buenos Aires. Sans vouloir fâcher leurs amis anglo saxons, Rose et Raoul trouvent que les noms d’origine des cafés porteños, « La Orchidea », « La Poesia », « Café Tortoni », « Café de los Angelitos », « Las Violetas », « Mundo bizarro » sonnent tout de même mieux que les rugueux « Starbuck’s » (beurk!), « Mac Donald’s » et autres « Burger King » qui les ont trop souvent remplacés dans des superbes édifices prestigieux du coeur de ville.

Mais les Argentins ne sont pas comme les Piche, ils acceptent plus volontiers la domination linguistique et culturelle étatsuniène (« estadounidense» comme il est dit ici où l’on demeure malgré tout chatouilleux sur l’appropriation des termes Amérique et Américains par les seuls « Etatsuniens »). Pour preuve les films à l’affiche dans les principales salles de la ville qui sont quasi exclusivement les « blockbusters » (et allons-y !!!) hollywoodiens en version originale sous-titrée. « C’est bien, comme ça, les aveugles peuvent lire ce qui se dit » lâche un Piche qui ne sera pas dénoncé dans ces lignes car il exerce des menaces à l’encontre de l’autre Piche, « si tu me dénonces, je dirai comment tu conjugues l’auxiliaire « haber » (avoir) en « haribo » (bonbon à la réglisse fabriqué à Uzès…) ».

C’est tendu en ce moment chez les Piche.

A Bientôt.

Cocktail molotov

10 février 2013

« Vous mettez un peu de chlorate de potassium et du sucre dans un papier, vous le pliez, ce sera le détonateur. Vous le collez sur la bouteille qui, elle, sera remplie d’essence ».

L’explosion d’une toute belle 2cv Citroën blanche bombardée par plusieurs cocktails molotov lancés par des artistes prouve que la recette marche. La preuve, la deudeuche est là devant les Piche, a moitié calcinée, posée sur d’épais traités de droit constitutionnel au milieu de la salle d’exposition du parc de la mémoire dédié aux victimes du terrorisme d’Etat.

Le cours d’explosif est présenté dans une vidéo qui explique l’origine et la raison de cette oeuvre d’art. Elle a été enregistrée par un survivant des émeutes de Cordoba contre la dictature argentine des années 70.

Inauguré assez récemment, ce parc de 14 hectares a été livré aux artistes plutôt qu’aux historiens. Le résultat est remarquable. Notamment, la longue promenade en bordure du Rio de la Plata où, sur chaque lampadaire, un groupe d’artistes a affiché une série de panneaux imitant la signalétique à base de pictogrammes. Terribles, à force d’expression synthétique des actions de la dictature.

Quelques exemples : sur un panneau en losange, fond jaune, un à plat noir dessine la forme d’un avion, et, dans l’avion, un homme. Ce sont les vols de la mort. Ces milliers de prisonniers que la dictature a précipité depuis des avions dans le Rio de la Plata. Foin de longs discours, tout est dit en une image ultra simple. Et le Rio de la Plata est là à quelques mètres…

Même type de panneau, même fond jaune, même simplicité, une succession de barres verticales noires, et, derrière les barres, le profil d’une femme au ventre rond. Evocation des bébés volés aux femmes enceintes, incarcérées puis assassinées.

Emus par ce lieu de mémoire dont l’intelligence fait ressortir en contre-point la brutalité de la bêtise humaine, les Piche ne peuvent s’empêcher de se remémorer d’autres lieux de mémoire rencontrés lors de précédents voyages.

Celui de Nankin qui perpétue le massacre de 300 000 Chinois de la ville par l’armée japonaise. Un lieu impressionnant par sa dignité et son contenu historique.

Celui du chemin de fer de la mort (death railway) à Kanchanaburi en Thaïlande à la frontière de la Malaisie, rendu célèbre par le film « Le pont de la rivière Kwaï ». Dans ce défilé reliant les deux pays des jeunes, Hollandais et Britanniques, tombaient comme des mouches.

Celui de la marche de la mort (encore et toujours) aux Philippines. Une marche forcée de 97 km, décidée par les Japonais, qui a fait plus de 20 000 victimes philippines et américaines en quelques jours.

Tout ces lieux ont un point commun : ils parlent pour les victimes. Et, comme à Buenos Aires, elles nous disent « nunca mas ! ». Plus jamais ça !

Les Piche ne sont pas loin de penser que c’est vraiment le moment de bien écouter leur message.

A bientôt

Montevideo, immersion périscopique

28 janvier 2013

Les Piche poursuivent leur immersion sud américaine. Habitués qu’ils sont à naviguer en surface, ils ont du mal à descendre sous ce niveau. On ne passe pas aisément du voilier au sous-marin. C’est un peu contre nature. Alors, Rose et Raoul n’ont rien trouvé de mieux pour suivre des cours d’espagnol que de s’inscrire à … l’Alliance Francaise de Buenos Aires. Ici ce sont les vacances d’été et les étudiants sont sur les plages. Pour payer ses frais fixes l’Alliance Française propose donc aux Français de passage des cours intensifs d’espagnol à des prix défiant toute concurrence.

Immersion uruguayenne la semaine passée, à faible profondeur, là encore.

Les amis uruguayens chez qui les Piche résidaient vivent depuis des décennies à Paris et parlent le français à la perfection. Bien sûr, de temps en temps, les échanges se sont pratiqués en espagnol mais pour débattre du rôle de la pensée clanique dans la société moderne (le hobby de leur hôte, Miguel), difficile de ne pas remonter à la surface de la langue française et à ses horizons sans limite.

A Montévidéo, moment d’émotion lorsque Rose et Raoul apprennent que Miguel, réfugié politique en France dans les années 70 a vécu dans le même foyer de la Cimade à Massy où ils résidaient eux-mêmes à la fin des années 60 et qui a joué un si grand rôle dans leur vie.

Emotion prolongée lors d’un repas avec une dizaine de personnes quasiment toutes anciennes réfugiées politiques en France, revenues dans leur pays après la dictature. A nouveau, donc, immersion périscopique pour les Piche. La conversation remontant aisément de l’espagnol vers le français avec ces bilingues, ravis de pratiquer la langue de Molière et ces Piche ravis de délaisser celle de Cervantès pour mieux comprendre et se faire comprendre sur des sujets difficiles.

Comme le tour de table (sociologue, députée, avocate, membre de l’Unesco, directrice d’ONG, etc.) ne manquait pas de conversation, les Piche ont souvent fait surface pour ne pas plonger au plus profond des abîmes de l’incompréhension.

Mis en confiance par l’ambiance très amicale, Raoul a répondu en toute franchise à la question de l’amie avocate « penses tu que la France a eu raison d’intervenir au Mali ? » par un « oui » franc et massif. Une opinion, peu partagée par les convives, lesquels gardent un souvenir cuisant d’une autre intervention, celle des Américains dans leur pays dans les années 70 (via la CIA). Raoul, lui, pensait aux Maliens rencontrés il y a deux ans dans leur pays et qui ne leur avaient pas semblé appeler de tous leurs voeux l’application d’une charia pure et dure à Segou, Mopti ou Bamako. Comparaison n’est pas toujours raison. Surtout s’agissant de l’Afrique.

Les Piche comprennent fort bien ce qui est écrit sur les étiquettes des bouteilles de vin. Pourtant, elles leurs réservent parfois des surprises : Pinot noir (là ça va) mais « blanc de noirs » (en français dans le texte) c’est conceptuellement plus difficile à percevoir, surtout lorsque le vin est… rosé! Il existe une explication, on laisse au lecteur le soin de la trouver.

Les Piche vous quittent pour retourner en immersion chez le boucher. Le mot nouveau à tester est « grueso » : « quisiera un trozo de lomo grueso », « je voudrais un morceau de filet épais ». S’il revient avec une tranche de jambon cuit, Raoul n’aura plus qu’à noyer son désespoir en prenant un submarino, pur produit argentino-uruguayen. Ceux qui ont suivi les Piche en Argentine en 2005 savent ce que c’est. Ils ont oublié ? Ah! Eh bien qu’ils fassent comme Raoul qu’ils révisent !

A bientôt

PS 4cm d’épaisseur le morceau ! Raoul s’est bien fait comprendre.

PS Les textes des Piche sont sur le blog : http://www.raoulpiche.fr/

Buenos Aires, la boucherie !

20 janvier 2013

Depuis 10 jours les Piche sont à Buenos Aires et ils y restent. Un exploit. D’habitude, quelques jours après être arrivés dans un pays il commencent à le parcourir en tous sens.

Cette année, ils ont décidé de tenter une nouvelle expérience : le voyage « en immersion ». Autrement dit, s’installer et vivre la vie de tous les jours des habitants d’une ville. Apprendre leur langue, partager leurs principaux centres d’intérêt et si possible des moments de vie avec eux.

Les Piche ont donc élu domicile dans un petit appartement au second étage d’un immeuble de l’avenue de l’Etat d’Israel à Buenos Aires. Il se trouve dans un quartier « à vivre », pas dans une zone touristique, un peu le 12ème arrondissement de Paris. Le métro est à 10 minutes, le bus au pied de l’immeuble et avec ces moyens de transport le coeur de la ville à 15 ou 20 minutes. Les petits commerces sont nombreux.

Premier contact avec la vie quotidienne argentine, les boucheries. Dans un rayon de 5 minutes à pied les Piche en comptent une demi douzaine. Il est vrai que les Argentins qui ne sont que 40 millions mangent autant de viande que les Américains qui sont 315 millions, 8 fois plus !

Il faut s’y mettre.

Premier essai dans une boucherie du voisinage. Raoul demande « un lomo de bife », le top des morceaux de boeuf (le filet) et reçoit en retour une rafale de questions dont il devine qu’elles sont destinées à lui demander quel « lomo »? Pour cuisiner comment? Et bien d’autres précisions incompréhensibles pour lui.

« Por hacer asado », lance-t-il timidement espérant faire comprendre qu’il veut tout simplement faire griller son filet de boeuf. Nouvelles questions, grimaces d’incompréhension de Raoul qui se retrouve finalement avec deux mega steaks de « chorizo de bife » pour la faramineuse somme de… 2 euros le steak. Finalement, les Piche se partageront un de ces deux délicieux steaks car ils n’ont pas encore l’entraînement carnivore des porteños pour en engloutir un entier chacun.

Mais juré promis, immersion, immersion ils vont s’occuper de leurs coronaires et augmenter les doses. Pour cela, ils ont commencé à apprendre le vocabulaire technique de la boucherie : cuadril, bife angosto, tira de asado, matambre, bife ancho, solomillo, aguja, bola de lomo devraient leur permettre de faire rapidement grimper leur taux de cholestérol.

On l’aura compris le Raoul a pas mal de chemin à parcourir avant de comprendre et se faire comprendre lorsqu’il s’éloigne du vocabulaire courant du voyageur. Rose est plus à l’aise mais elle laisse volontiers Raoul aller au feu.

Une difficulté supplémentaire attend les Piche. Ici, les sons « yeu » (ll, ye, yo, ya … en espagnol) se disent carrément « che », à l’auvergnate. Donc un vulgaire poulet qui partout en Amérique du sud s’appelle un « pollo » (phonétiquement « pollio ») devient subitement un « pocho ».

Cette prononciation bizarre a conduit Raoul à un contre sens de haute volée.

Dans le petit restaurant de la rue d’à côté, où ils ont leur rond de serviette, Raoul souhaitant mieux connaître leur hôte lui demande comment il s’appelle. La réponse à l’oreille de Raoul est « Chomechamo, José ». Raoul pour qui « Chomechamo » sonne bigrement quechua lui dit « vous êtes indien ? De Salta à la frontière Bolivienne? ». Tête de José ! « Je suis d’origine italienne, je suis né en Calabre! ». Coup de pied sous la table de Rose et rapide précision de sa part : « chomechamo », cela se prononce « yo me llamo » en espagnol (« je m’appelle »).

Raoul vient d’apprendre qu’au sens propre comme au sens figuré, lorsqu’on s’immerge parfois on boit la tasse.

A bientôt

La migration annuelle des Piche a commencé

12 janvier 2013

Pour les Piche, le début de l’année marque la grande migration d’hiver. Mais pourquoi migrent-ils ? Les flamands, les cigognes, les hirondelles on comprend. Mais les Piche ?

Mardi dernier, à 4h30 du matin, lorsque le réveil les a tirés d’un profond sommeil pour aller prendre l’avion, Rose et Raoul se sont exclamés de concert, « le voyage commence ! » apportant un début de réponse à cette interrogation : le voyage, c’est rompre avec les habitudes.

Les Piche ne se réveillent jamais à 4h30 du matin !

Voyager, c’est aussi changer de langue et du coup, devenir un peu analphabète, ce qui incite à la modestie. C’est changer de cuisine et apprendre à goûter à tout comme lorsque les parents éduquent leurs enfants (les Piche aiment bien ce retour en enfance).

Voyager, c’est perdre ses repères géographiques et découvrir que dans l’hémisphère austral si l’on se dirige vers le soleil on va vers le nord et non pas vers le sud (après être revenus sur leurs pas sur 2 km, les Piche ont retenu la leçon).

Voyager, même sans être de grands aventuriers, c’est s’étonner. Quel bonheur que l’étonnement ! (tiens ! à l’instant où s’écrivent ces lignes, un « promeneur de chiens » avec une douzaine de toutous en laisses, passe devant les Piche, étonnant, non ?).

Voyager c’est rompre, sans risque certes, mais rompre tout de même. Voyager c’est apprendre et comme l’a écrit un illustre inconnu « tout n’est qu’apprentissage dans la vie! (…) développer des projets et s’adapter aux changements sont des gages de bonheur et de longévité ».

Voilà pourquoi les Piche migrent, ils font leur cure de jouvence. Pourquoi en hiver ? Parce que le Piche est un animal frileux.

De la philosophie tropicale tout ça. Uniquement pour ne pas avoir à raconter comment Rose, tête frisée et seins nus sous un tee shirt polynésien a grillé la priorité à un loubavitch, longue barbe, chemise blanche, chapeau noir, kippa et petites ficelles pour lui piquer les quatre sièges libres qui permettaient de s’allonger dans un Airbus A340 pas trop rempli. Ni pour décrire comment Raoul poursuivant le même homme de son acharnement s’est emparé de son sandwich pas suffisamment cachère à son goût.

Peut être également pour ne pas avoir à préciser que les Piche installés depuis quatre jours rue de l’Etat d’Israel à Buenos Aires n’ont pu s’empêcher de remarquer que la rue parallèle à la leur s’appelle rue de Palestine. Et de se souvenir que les parallèles ne se rencontrent jamais…

Le fait est que, cette année, les Piche ont migré à Buenos Aires pour un voyage qu’ils imaginent très différent des précédents. Ils s’en expliqueront sans doute dans un prochain message.

A bientôt

Kuala Lumpur, déluge, jeu d’arcade et Titanic

19 mars 2012

Un flash bleu intense, un claquement sec assourdissant, la foudre est tombée très près des Piche. Abrités sous leurs parapluies ils se dirigent vers un restaurant lorsque le ciel leur tombe sur la tête. Raoul qui vient d’acheter un parapluie tout neuf s’inquiète de la pointe qui en dépasse, « pas bon pour la foudre ». Puis il réalise que Rose et lui marchent dans une rue bordée de gratte-ciel de 200 à 400 mètres de haut, hérissés d’antennes et de paratonnerres. La foudre a l’embarras du choix pour s’abattre ailleurs que sur leurs malheureux parapluies.

Durant deux heures c’est le déluge. Confortablement assis à une table d’un excellent restaurant, les Piche devisent sur cette pluie tropicale. Elle évoque les épisodes cévenols qu’ils connaissent si bien et redoutent tant. L’intensité est la même. « Mais chez eux c’est au moins une fois par semaine. Ils sont habitués » remarque Rose.

Faux.

Bien qu’il pleuve chaque jour à Kuala Lumpur en fin d’après-midi, ce soir là était un peu inhabituel. La preuve, le lendemain, le journal titrait sur les inondations qui avaient noyé certains quartiers et les voitures submergées dans des parkings. Tiens, tiens ! 200 millimètres de pluie en une soirée, on sait faire au sud des Cévennes.

Si la pluie profite à la végétation, les dollars, eux, font pousser les gratte-ciel. Kuala Lumpur en est hérissée (dont les fameuses tours jumelles Petronas de 421 mètres de haut) et cela continue. Des forêts de grues, de gigantesques chantiers grignotent petit à petit ce qu’il reste de quartiers traditionnels.

Résultat, les déplacements à pied relèvent du jeu d’arcade. Il y a une énigme à trouver tous les 300 mètres pour progresser de 300 mètres.

Exemple vécu par les Piche pour se rendre au Musée National de Malaisie.

Départ : la station du monorail. Traverser une ou deux avenues au trafic intense. S’engager sous un tunnel de béton, au-dessus duquel se trouve le chantier d’un gratte-ciel. Après 200 mètres dans le bruit et la fureur qui règne là-dessous prendre un petit escalier dérobé sur la droite, il donne accès à un escalier plus grand qui débouche dans une rue face à la gare centrale de Kuala Lumpur.

Traverser la gare au niveau 0, puis au niveau 1. En sortant on se trouve devant l’immense bâtiment de l’hôtel Méridien. Traverser le parking situé sous l’hôtel. On parvient alors à une bretelle d’accès d’une double voie rapide située en contrebas. Infranchissable. Les Piche scrutent le paysage, cherchent la solution, cela dure 10 minutes. Ah ! Un petit trottoir de 50 cm de large permet d’accéder à un escalier à peine visible, là-bas à 100 m de l’autre côté d’une seconde bretelle. L’escalier descend d’un niveau et amène en bordure d’une rue « normale » qui donne accès à une passerelle, laquelle franchit la voie rapide. Encore quelques mètres et c’est l’entrée dans le parc central de la ville. Un sentier, sans indication, paraît aller dans la bonne direction. Une petite colline, l’arrière d’un bâtiment à contourner et voilà l’entrée du Musée National ! Facile !

Raoul, au caissier : « C’est vous qui devriez nous payer pour être parvenus jusqu’ici ». « Vous n’êtes pas venus en voiture ? » « Non !!! » Parfois il est suspect d’être piéton.

En comparaison, Singapour est une ville respirable, avec moins de gratte-ciel, moins hauts, plus d’espaces verts, de la place pour les piétons et un excellent réseau de transports publics.

A Singapour les Piche ont vu une remarquable exposition organisée autour des objets remontés de l’épave du Titanic.

Lorsqu’ils contemplent les noms aux sommets des gratte-ciel de Kuala Lumpur et de Singapour, ils ne peuvent s’empêcher de faire un rapprochement : Chartered Bank, ING Bank, Maybank, UCO Bank, Bank of east Asia, Barclays, HSBC, Indian Bank, KBC Bank, RHB islamic Bank, City Bank etc. Ne sont-ce pas là autant de Titanic qui se dirigent vers des écueils dont ils font fi comme d’autres ont ingnoré les icebergs de l’Atlantique nord le 12 avril 1912.

To big to fail ?

Le Titanic, lui aussi était réputé insubmersible…

Curry de tête de poisson

19 mars 2012

La synthèse la plus improbable de deux cuisines aux antipodes l’une de l’autre est réalisée par les Malaisiens de Penang, le porridge aux grenouilles ! Le porridge des Anglais et les grenouilles des Français dans la même cassolette, un exploit culinaire.

A GeorgesTown, capitale de l’île de Penang, le mot « mélange » est le maître mot : mélange des mets, des races, des langues, des architectures caractérise cette petite ville classée au patrimoine mondial de l’humanité. Tous les peuples d’Asie, et d’ailleurs, se retrouvent : Chinois, Indiens, Birmans, Javanais, Arabes, Arméniens, Japonais, Ceylanais, Malais (il y en a aussi…) sans compter quelques autochtones aux appellations étranges Aceh, Bugis, Minangkaban. Claude Guéant s’il venait à Penang en aurait les cheveux qui se dressent sur la tête : toutes ces communautés vivent en parfaite intelligence depuis 300 ans. A croire que c’est lorsqu’elle est insuffisante que l’immigration pose problème.

Dans le quartier indien on est vraiment en Inde. Musique Bollywoodienne aigrelette à fond, femmes en sari, hommes à la peau très foncée, vendeurs d’épices, innombrables bijouteries étalant les ors si prisés, tailleurs, restaurants, temples, tout y est. Une rue à traverser et on se retrouve en Chine. Enseignes écrites en chinois, journaux chinois, temples bouddhistes, ateliers de toutes sortes, couleurs rouge et or, anciennes et magnifiques maisons d’ex-riches marchands transformées en musées qui servent de décors à des films (« Indochine » a été tourné dans l’une d’elles).

La beauté du centre de la ville tient pour beaucoup à l’architecture coloniale britannique des maisons alignées les unes contre les autres et cela quelle que soit la « coloration » du quartier. Avec la richesse croissante de la Malaisie, les restaurations de ces maisons vont bon train, le classement par l’Unesco agissant comme un catalyseur.

Rose et Raoul Piche appréhendent cette plaisante diversité de la façon la plus triviale, par la bouffe !

Ils ont leur rond de serviette au Red Garden, un « food court » où sont rassemblés une vingtaine d’étals de cuisine, chacun avec ses spécialités, ce qui leur permet de découvrir toutes les saveurs d’Asie. Celle du Laksa (typiquement malaisien) soupe de poisson aigre douce au tamarin avec des nouilles, du Koay Teow qui mêle crevettes, fruits de mer, légumes et nombre d’autres éléments non identifiés, curry de tête de poisson, Wan Tan Mee, Hokkien Mee, Nasi Kandar, Cendal, etc.

Rose et Raoul qui en 20 ans ont englouti près de 1000 douzaines d’huîtres n’ont pas pu franchir le pas de l’huître frite, pourtant spécialité de Penang. Tolérants les Piche, certes, mais il y a des limites à l’hérésie ! Idem pour le porridge aux grenouilles. Rose a mangé les grenouilles mais a refusé le porridge. On met l’identité nationale où l’on peut. Content Monsieur Guéant ?

Plongée en eau trouble

19 mars 2012

Sourcil froncé par l’inquiétude, le commandant du « Friendship », bateau de 25 mètres avec 60 personnes à bord, scrute la surface de l’eau. Il lui manque deux passagers. Le bateau est au mouillage à l’entrée de Maya Bay, sur l’île de Kho Phi Phi. Il a vu les deux manquant plonger pour aller explorer les fonds sous-marins. Ils devaient remonter à bord au bout d’une heure. Personne. La sirène retentit pour les appeler. Rien. Rose et Raoul Piche ont disparu.

Ce sont leurs amis, Chantal et Patrice qui ont prévenu le capitaine de leur absence alors qu’il allait lever l’ancre sans eux. Face au chef de bord inquiet, ils se veulent rassurant, « ne vous en faites pas ils sont très expérimentés ».

Une heure auparavant, les Piche avaient effectivement quitté le bord avec masque et tuba pour admirer la faune et la flore des eaux tropicales. Sous le bateau le spectacle était intéressant sans être très riche. En nageant vers la plage éloignée, Rose et Raoul pensaient en voir plus. Ce fut le contraire. Sur les trois-quart du trajet un spectacle de désolation : des coraux morts et plus aucun poisson. Parvenus à la plage ils pensaient trouver la barque censée ramener les passagers à bord. Mais tout le monde était déjà retourné au bateau.

Ils entendaient la sirène du « Friendship » les appeler désespérément mais aucune barque pour revenir. Finalement en graissant la patte à un marinier ils sont rapatriés sur leur navire… et grondés par le commandant : « ne refaites plus jamais ça ! ». Il s’en est fallu de peu que les Piche jouent les Robinson sur cette île déserte. Ils regrettent presque d’avoir été récupérés.

Le lendemain les Piche se retrouvent sur une petite plage idyllique où ils sont logés dans des bungalows spartiates mais à la vue superbe. Un minuscule centre de plongée est là. Raoul ne veut pas rester sur une mauvaise impression. Il décide d’effectuer deux plongées bouteille. « Avec leur bateau rapide on va pouvoir aller sur de bons coins », pense-t-il.

Une demi-heure de mer et première plongée à proximité d’un îlot. Après 40 minutes dans une eau trouble, Raoul se demande si le but de cette plongée est de démontrer qu’il n’y a rien à voir autour de Phuket ! Devinant ses pensées le chef de palanquée lui annonce que la seconde plongée va être bien plus belle, avec coraux mous et poissons « mais avec pas mal de courant ».

2ème plongée, sur un second îlot. Immersion, eau de plus en plus trouble en descendant et encore moins de poissons. Tout à coup, au détour d’un rocher, Raoul voit le chef de palanquée emporté à toute allure sur sa gauche par un très fort courant. Pour ne pas le perdre il suit, comme les trois autres plongeurs qui sont avec lui. La silhouette du leader est à peine perceptible dans la brume du fond. Les coraux mous sont là survolés à toute vitesse sans possibilité de les contempler. L’attention des plongeurs est totalement concentrée sur le fait de ne pas se perdre de vue les uns les autres ! Profondeur -30m. Début d’une lente remontée. Plus rien à voir ni dessous, ni dessus. Après des paliers, surface. « Tiens, on est au large ! » remarque Raoul. Pas de bateau pour récupérer les plongeurs. Ils barbotent 20 minutes avant d’être aperçus et récupérés.

De retour au bungalow Raoul est accueilli par une Rose enthousiaste « là, devant la plage, il y a plein de poissons, des coraux, c’est super ».

Raoul s’y rend et reconnaît que, sans être les Philippines, l’endroit est de loin le plus riche qu’il ait vu autour de Phuket.

A pied, depuis la plage, avec un simple masque, un tuba et des palmes.

Grrrrrr…!!!

Astrologie birmane

19 mars 2012

Tout le monde connaît cette réflexion d’Einstein : « Deux domaines donnent une idée de l’infini : l’espace intersidéral et la bêtise humaine. Mais pour ce qui est de l’espace j’ai encore un doute ».

L’histoire des dernières  décennies de la Birmanie n’aurait pas été de nature à modifier son jugement tant la bêtise des dirigeants de ce pays a atteint des sommets.

Ils ne seraient sans doute pas parvenus à de telles cimes, s’ils n’avaient été aidés par leurs astrologues. Cela a donné les épisodes suivants.

Comme le directeur de la Banque de France l’ignore, le chiffre 9 porte bonheur. Heureusement, un dirigeant birman en a été informé par son astrologue. Du jour au lendemain, il a remplacé les billets de 100, 50, 10, etc, par des billets de 90, 75, 35, 15, ruinant les économie liquides des petits épargnants.

Plus tard, la même source d’information a annoncé des catastrophes, si dans le pays, ex colonie britannique, on continuait à rouler à gauche. Au jour J on a été prié de rouler… à droite. Mais  la totalité du parc automobile est resté avec des volants à droite. Y compris les voitures neuves! Donc, pour doubler, on est prié de se déporter largement sur la gauche, histoire de voir si la voie est libre. Audacieux.

Un autre cataclysme a été prédit par les astrologues conseillés du pouvoir, si la capitale restait à Rangoon. A coup de millions de dollars a donc été construite une ville nouvelle, au milieu de nulle part, à 400 kilomètres de Rangoon et 300 de Mandalay. Bâtiments administratifs, aéroport, autoroutes à quatre, six et même huit voies, sont sortis du sol pour faciliter les déplacements des dirigeants et des hauts fonctionnaires du pays. Les Birmans, déjà pauvres, se sont appauvris un peu plus.

A la question rouge du jeu des mille euros « quelle est la capitale de la Birmanie? », la réponse est donc « Nay Pyi Taw ». Au passage, rappelons que les mêmes ont débaptisé leur pays qui ne s’appelle plus la Birmanie mais le Myanmar. Nay Pyi Taw est donc la capitale du Myanmar.

La liste est longue et serait fastidieuse des exploits de cette gouvernance astrologique. Elle s’est accompagnée, on le sait, d’une tyrannie meurtrière pour le peuple.

Mais les choses bougent, paraît-il, et les élections d’avril prochain suscitent beaucoup d’espoir. Pourvu que les astrologues ne s’en mêlent pas !

Tout ce qui est d’or… brille

19 mars 2012

Un rocher couvert d’or, en déséquilibre sur le vide, c’est le rocher d’or. Le défi aux lois de la gravitation que ce gros caillou semble poser n’en est pas un. Son équilibre tient à un cheveu.

Pas n’importe lequel. Un cheveu de Bouddha placé à son sommet. 10 000 fois plus résistant qu’un fil d’araignée, lui-même 1000 fois plus résistant que l’acier, le cheveu de Bouddha c’est le top du top de la résistance mécanique. Si les Birmans créaient Air Bouddha doté d’une flotte d’avions en poils de Bouddha, ils auraient la compagnie aérienne la plus sûre du monde.

Les Birmans sont fanas du rocher d’or, un de leur lieu de pèlerinage préféré.

Toutefois, n’accède pas au rocher d’or qui veut. Il faut en payer le prix. Non pas en dollars (encore qu’un petit billet de 5 $ n’est pas de refus à l’entrée du site) mais en sueur et en sensations fortes.

Bien entendu, le rocher, l’or, le cheveu tout ça est perché au sommet d’un montagne quasi inaccessible. La piété n’étant plus ce qu’elle était, même chez les bouddhistes, une partie du trajet s’effectue non pas à pied mais… en bétaillère. Moderne, Nissan dernier cri, moteur puissant, elle emporte 42 pèlerins assis sur 7 étroites poutres (en teck, évidement) placées en travers de la benne arrière. Aucun bus ne pourrait gravir les pentes, parfois de 30%, ni négocier les épingles à cheveu (de Bouddha?) qui conduisent à l’étape intermédiaire avant la montée finale à pied. Pendant trois quart d’heure la bétaillère conduit les pèlerins vers les sommets de la spiritualité.

A chaque virage, sur chaque poutre, le chargement glisse, écrasant le pèlerin assis à l’extrême droite ou à l’extrême gauche du morceau de bois, selon le sens du tournant. Cela au milieu des cris et des rires. Les bouddhistes sont très rieurs. Comme le Bouddha qui a toujours un sourire en coin (un débat savant fait rage pour savoir si ce sourire est moqueur ou pas mais cela dépasse largement la compétence des Piche qui se refusent à prendre position).

Lors des reprises en côte, c’est en arrière que les pèlerins sont projetés. De ces mouvements d’ensemble, s’élève une sorte de « Ola! » birmane qui accompagne la vague humaine dans les oscillations successives intra bétaillère.

Parvenue à destination, une passerelle, genre passerelle d’avion, est avancée sur le flanc de la bétaillère afin de permettre aux passagers de débarquer. Air Bouddha dispose déjà des passerelles…

Seconde épreuve, l’ascension terminale à pied. La pente est encore plus forte que sur la portion précédente.

Comme à son habitude, Rose légère comme une plume s’envole. Raoul opte pour un pas d’une extrême lenteur. Du coup, il devient la cible des porteurs de chaises à porteurs. Cheveux blancs, pas lent, en voilà un qui n’ira pas jusqu’au bout, pensent-ils. Et de tourner autour de Raoul tels des corbeaux guettant le dernier souffle de leur proie. Mais de souffle, le Raoul n’en manque pas. A cette allure, il est capable de marcher des heures et des heures. A force de les voir tourner autour de lui et de remonter inutilement la côte, c’est Piche qui prend pitié d’eux. Le « non » birman étant imprononçable, le « no » isolé ne donnant pas de résultats, Raoul Piche se campe sur ses jambes et leur assène une série de « no, no, no, no, no » qui font enfin effet. Les corbeaux s’envolent.

Libéré de ses anges gardiens, il poursuit son chemin qui passe devant des étals de pharmacopées fortes : têtes de bouc sanguinolentes, crânes de singes, peaux de serpents, pattes velues et griffus d’origine inconnue, fioles contenant divers ingrédients solides baignant dans un liquide couleur whisky. Sûr, voilà des médecines 100% naturelles bien plus efficaces que du butylhydroxyanisole ou du chlorydrate de loperamide horriblement chimiques.

Après une heure de marche, Rose, Raoul et leurs amis se retrouvent au sommet. Au rocher d’or ! Vision superbe.

Rose veut sacrifier à la tradition et coller une feuille d’or sur le bloc de pierre. C’est oublier un peu vite qu’elle est un être impur, indigne de ce geste : « interdit aux femmes ». Une interdiction qui ne la rapproche pas vraiment du bouddhisme ce qui aurait pourtant constitué le véritable miracle du lieu et du jour.

Raoul tente de la remplacer dans l’expédition mais l’accès lui est également interdit. Dans son petit sac à dos il a rangé ses chaussures après s’être mis pieds nus comme dans tous les lieux sacrés du bouddhisme. Les chaussures aux semelles maculées de crachats rouge au jus de bétel ne doivent pas approcher du rocher même enfouies dans un sac en plastic enfoncé dans un sac à dos. Mauvaises vibrations. Délesté de son sac confié à l’« impure » (un peu plus, un peu moins…), Raoul colle l’or sur l’or du rocher. Le luxe suprême en ces temps de crise.

Le soir au restaurant, Rose et Raoul croisent un groupe de Grecs. « Des Grecs ici? Avec tous les problèmes qu’ils ont dans leur pays! ». « A moins que… » Une pensée folle traverse l’esprit de Piche, « non, ils n’oseraient pas ! L’or du Bouddha, tout de même ! ».
En sortant du restaurant, c’est à peine s’ils saluent ces étranges visiteurs, à leurs yeux plus indignes qu’indignés.

Cités lacustres et moine francophile

19 mars 2012

Le lac Inle n’est pas un lac comme les autres. La vie ne s’y organise pas autour mais dessus. Les villages formés de maisons plantées sur des forêts de pilotis se trouvent sur l’eau. Les habitants se déplacent uniquement en barque et cultivent des jardins flottants dont ils parcourent les allées sur des canoës plats à coup de pagaie ou de godille.

Singulière godille puisqu’elle est actionnée par le rameur en position debout à l’aide de sa jambe droite enroulée sur elle. Bel exercice d’équilibre, le rameur se tient sur une seule jambe, l’autre écartée sur le côté au-dessus de l’eau actionnant avec vigueur l’étrange propulseur.

Pour aller d’un village à l’autre et transporter hommes et marchandises ce sont de longues, fines et élégantes barques en teck (de Birmanie, bien sûr, commerce local oblige) qui sont utilisées.

Les maisons en bois et bambou tressé vont du plus rudimentaire au plus sophistiqué, notamment celles destinées à accueillir les riches touristes « les pieds dans l’eau ». L’unicité des matériaux naturels procure à ces villages une indéniable beauté. Les porcs eux-mêmes ont droit à des porcheries perchées sur pilotis !

Sur l’eau on croise des pêcheurs, des cultivateurs, des grands-mères avec leurs petits-fils, des enfants seuls sur de frêles embarcations godillants comme des adultes, des mères qui ramènent leur progéniture de l’école, bref toute la vie qui d’ordinaire anime les rues des villages « terrestres ».

Tisserands, forgerons bijoutiers, les artisans ont également des ateliers sur le lac. La forge et le travail des lames d’aciers rougies ont impressionné les Piche. Du soufflet manuel à l’enclume, jusqu’aux masses, maniées par trois costauds, qui s’abattent à tour de rôle pour donner sa forme à la pièce d’acier, rien n’a changé dans ce tableau depuis des siècles.

Partis en ballade à vélo autour du lac Inle, les Piche et leurs amis se sont ingéniés à se perdre dans des chemins de traverses. Au bout de l’un d’eux, ils croient débarquer chez des alchimistes. Dans des grands chaudrons fumants et écumants bouillonne un étrange liquide verdâtre. Muni d’une grosse louche à très long manche un homme transvase les contenus tandis qu’une femme pousse les feux en chargeant de résidu de canne à sucre le foyer situé sous les chaudrons. La transmutation qui s’opère là est celle du jus de canne, en sucre de canne. Elle ne rapporte pas beaucoup d’or…

Plus loin, un autre chemin aboutit dans un hameau où un paysan invite les promeneurs dans sa pauvre maison. Même sur terre, les maisons dans la campagne birmane sont sur pilotis. Une échelle de bambou inclinée sert d’escalier glissant pour accéder à l’étage. Assis sur des nattes tressées, les Piche et leurs amis sont reçus avec une gentillesse touchante. Thé, couenne de porc grillée, le premier geste des pauvres, ici comme ailleurs, est d’offrir, de donner. Le paysan est très fier de présenter six de ses dix enfants âgés de 20 ans à 2 ans. L’un d’eux, 13 ans, parle un peu l’anglais qu’il apprend à l’école. Une de ses soeurs de 20 ans ne semble pas avoir bénéficié du même apprentissage.

Ailleurs, le hasard conduit les Piche dans une clairière où trône un monastère de teck. Invités à pénétrer dans ce lieu, les promeneurs sont à nouveau accueillis de façon on ne peut plus amicale avec force sourires. Surprise ! Le vieux moine, maître des lieux, connaît des mots de français qu’il mêle à l’anglais. Tout de suite il porte des jugements péremptoires : « Les Français, good, good, the best », « les Anglais », grimace et pouce vers le bas, « les Allemands », même geste, « les Italiens, les Espagnols, good, good ». Puis, le moine se lance dans l’énumération des présidents français depuis Sarkosy en remontant jusqu’à De Gaulle (avec un geste pour dessiner un gros nez) sans en omettre un seul. Viennent ensuite les grandes villes françaises, les châteaux de la Loire et… le nom d’un artiste très connu, précise-t-il, ancien, dont ni les Piche ni leurs amis ne comprennent le nom. Il faut dire que l’accent franco-birman du moine ne les aide pas. A force de répétitions, tout à coup, illumination de Raoul « BB! », « Brigitte Bardot s’exclame-t-il en dessinant à son tour avec les mains les formes féminines généreuses de la vedette », « Oui, oui ! Birgggittte Beurtot », s’enthousiasme le moine tout frétillant qui retrouve sa jeunesse.

A l’évocation joyeuse de BB dans ce sombre monastère, les Piche mesurent toute la distance qui sépare certaines dispositions spirituelles d’autres…

La rencontre avec Aung San Suu Kyi

19 mars 2012

Garée dans la rue qui conduit au marché de Bagan, une calèche porte, bien en vue, deux portraits : ceux de Aung San, père de l’indépendance de la Birmanie et de Aung San Suu Kyi, sa fille. Prix Nobel de la paix, la « Mandela » d’Asie, l’émule de Gandhi qui prône la non violence est omniprésente, en image, sur les étals de rue comme dans les taxis, signe d’une libéralisation apparente.

Après la calèche, les Piche passent devant le siège local de la « National league for democratie » (NLD), le parti d’Aung San Suu Kyi, qui arbore des banderoles fraîchement imprimées. Plus loin, ils s’étonnent de la foule massée des deux côtés de la route. Rose questionne une femme qui lui répond :

- Nous attendons notre leader, Aung San Suu Kyi, vous la connaissez ?

- Si nous la connaissons ? Mais le monde entier la connaît ! Elle doit passer par là ?

- Oui, oui elle va passer par là, répond la femme avec enthousiasme.

Branle bas de combat du côté des Piche et de leurs amis Chantal et Patrice. On s’enquiert de la trajectoire prévue, on fourbit caméras et appareils photos et chacun se perd rapidement dans la foule.

Au loin, Rose et Raoul semblent deviner des flashs qui crépitent, des voitures paraissent arrêtées. Ils se dirigent dans cette direction. Mais rien. Fausse alerte. Autour d’eux, sans qu’ils comprennent pourquoi, les gens traversent la route pour se placer sur un même bord. Rose et Raoul restent seuls du « mauvais côté ».

Raoul aperçoit un puits entouré d’un mur d’un bon mètre de haut, il grimpe dessus ce qui lui donne une vue parfaitement dégagée.

Il remarque alors une colonne de voitures qui avance lentement au loin et la foule qui s’agglutine autour. « Elle » est là, habillée de rouge, dépassant du toit de sa voiture, resplendissante. Raoul filme. Le cortège s’approche jusqu’à parvenir à proximité immédiate de la position stratégique de Raoul.

Aung San Suu Kyi salue la foule, non pas négligemment mais avec attention en cherchant le regard des gens. Elle arbore un superbe sourire. Son regard se porte vers la silhouette occidentale perchée sur un muret. Au même moment, Raoul qui a écarté la caméra de son visage la salue de la main. Elle lui répond du même geste, ses yeux rencontrant ceux de Raoul Piche, tout ému.

Le cortège poursuit lentement sa route entourée d’une nuée de motocyclistes et de piétons qui tentent de prolonger ce moment de grâce.

Rose et Raoul essaient de suivre mais y renoncent finalement. La rencontre a eu lieu et elle a été parfaite dans sa brièveté.

Arrêtés devant une échoppe, ils regardent les images prises, en compagnie des deux femmes birmanes qui s’excitent lorsque sur le petit écran, elles voient Aung San Suu Kyi, plein cadre, saluer la caméra. L’une d’elle tape de la main l’épaule de Raoul en tressautant sur place et en prononçant des paroles manifestement joyeuses mais totalement incompréhensibles pour les Piche. Bref instant de joie partagée.

Plus tard, en lisant le livre que Thierry Falise lui a consacré, Raoul lit les lignes suivantes :

« … mais c’est surtout le regard qui s’est affirmé. Intense, profond, scrutateur, dont on ne s’échappe qu’intimidé ou envoûté. C’est le regard de son père. » Et, Raoul de dire à Rose :

- C’est ce regard là que j’ai vu.

On a toujours besoin d’un petit Bouddha chez soi

19 mars 2012

Aux jeux Olympiques du Bouddhisme la Birmanie écrase tous ses compétiteurs. Le Cambodge, Le Laos, le Vietnam, l’Inde, la Chine, aucun n’approche la Birmanie pour le nombre de stupas, de pagodes, de temples, de bouddhas au kilomètre carré.

Les stupas, édifices en forme de cloches sont omniprésents en ville et dans les campagnes. Parfois, ils transforment des collines ou des plaines banales en paysage sublime (Mandalay, Bagan). En briques roses pour les plus anciens (les plus beaux), peints en blanc pour les plus communs, couleur or pour ceux qui font semblant d’être en or, en or 24 carats pour ceux qui ne font pas semblant. A Rangoon, l’un d’eux, monumental, est couvert de 700 kg de métal précieux. Rose prétend qu’avec l’envolée du cours de l’or s’ensuit une envolée de la glorification du Bouddha. Plus on s’enfonce dans la crise, plus l’or monte, plus Bouddha est remercié.

Bouddhisme philosophie ou religion, à l’écart de ce débat éculé Raoul Piche mondialement inconnu pour ses études sur les croyances développe la théorie suivante : Bouddha était un hippie. En effet, au coeur de chaque stupa se trouve un fragment de cheveu du Bouddha, ce dernier devait donc avoir une tignasse longue et abondante pour approvisionner ces innombrables édifices. A sa mort, toujours selon Raoul Piche, on a coupé ses cheveux en quatre, puis à nouveau en quatre, etc. (d’où l’expression populaire bien connue). Cela a permis d’en placer un peu sous chaque stupa.

Ce gourou-hippie, même s’il n’est pas un dieu est révéré comme tel. Une façon d’exprimer cette dévotion, hormis les stupas, consiste à édifier des statues à son image. Plus elles sont nombreuses, plus elles sont grandes, plus elles sont riches plus forte est la révérence.

Sur ce terrain aussi la Birmanie bat tous les records. Assis, debouts, couchés, couverts d’or, alignés par milliers la statuaire birmane du Bouddha est hors concours.

Le plus grand est debout, il mesure 116 mètres de haut, suivi par le « couché » 55 mètres seulement. Les plus nombreux, de quelques centimètres à peine, placés côte à côte comme les caractères d’un mot forment des lignes et des pages d’écriture sur les murs d’un temple kitchissime de Mandalay. Dans ce lieu unique, on en compte plusieurs centaines de milliers !

Un des Bouddha parmi les plus dorés, également à Mandaly, souffre d’hypertrophie plantaire. N’importe qui peut venir lui plaquer des feuilles d’or dessus. Les amateurs sont tellement nombreux et la  partie la plus accessible de sa personne étant les pieds, c’est là que l’or s’accumule. Ses extrémités auraient pris 20 centimètres d’embonpoint selon les meilleurs auteurs. Raoul Piche et son ami Patrice ont investi un euro cinquante d’or, soit dix feuilles, qu’ils ont été coller sur l’orteil droit du Bouddha espérant qu’ainsi ils éviteraient les ampoules au pied. Force est de constater que « ça marche ». Ni l’un, ni l’autre n’ont eu d’ampoules.

La fabrication des feuilles d’or est techniquement spectaculaire. Pour cela il faut de l’or, bien sûr, 12 grammes, un marteau, un gros de 3 kg, du bambou et deux esclaves. Le bambou sert à produire une feuille sur laquelle l’or n’adhère pas. Avec le marteau, un esclave frappe pendant une heure sur l’or (protégé, naturellement). Il en fait tripler la surface. Son collègue prend le relais pour une heure encore, nouvelle extension. Ainsi de suite 5 heures durant. L’or atteint alors une épaisseur de 0,00027 cm ce qui permet de produire 1800 feuilles carrées de 5×5 cm qui servent à dorer et à adorer Bouddha.

Comme il est toujours utile d’avoir un Bouddha chez soi, des artisans en sculptent à la chaîne  en sortie de Mandalay. Vous vous souvenez des sculpteurs de sphinx dans « Astérix et Cléopatre »? Eh bien ! ce sont les mêmes. Alignés les uns à côté des autres ils sculptent à la masse et au burin,  avec meuleuses, ponçeuses et polisseuses, des blocs de marbre de toutes tailles. Ni masque de protection, ni lunettes, ces artisans très jeunes ont la tête constamment dans un nuage de poussière de pierre qu’ils respirent à plein poumons.

Face à ce spectacle Rose déclare « pourvu que Bouddha fasse des miracles ». Raoul, cette fois-ci n’est pas trop sûr que « ça marche ».