Archive pour la catégorie ‘Malaisie’

Kuala Lumpur, déluge, jeu d’arcade et Titanic

Lundi 19 mars 2012

Un flash bleu intense, un claquement sec assourdissant, la foudre est tombée très près des Piche. Abrités sous leurs parapluies ils se dirigent vers un restaurant lorsque le ciel leur tombe sur la tête. Raoul qui vient d’acheter un parapluie tout neuf s’inquiète de la pointe qui en dépasse, « pas bon pour la foudre ». Puis il réalise que Rose et lui marchent dans une rue bordée de gratte-ciel de 200 à 400 mètres de haut, hérissés d’antennes et de paratonnerres. La foudre a l’embarras du choix pour s’abattre ailleurs que sur leurs malheureux parapluies.

Durant deux heures c’est le déluge. Confortablement assis à une table d’un excellent restaurant, les Piche devisent sur cette pluie tropicale. Elle évoque les épisodes cévenols qu’ils connaissent si bien et redoutent tant. L’intensité est la même. « Mais chez eux c’est au moins une fois par semaine. Ils sont habitués » remarque Rose.

Faux.

Bien qu’il pleuve chaque jour à Kuala Lumpur en fin d’après-midi, ce soir là était un peu inhabituel. La preuve, le lendemain, le journal titrait sur les inondations qui avaient noyé certains quartiers et les voitures submergées dans des parkings. Tiens, tiens ! 200 millimètres de pluie en une soirée, on sait faire au sud des Cévennes.

Si la pluie profite à la végétation, les dollars, eux, font pousser les gratte-ciel. Kuala Lumpur en est hérissée (dont les fameuses tours jumelles Petronas de 421 mètres de haut) et cela continue. Des forêts de grues, de gigantesques chantiers grignotent petit à petit ce qu’il reste de quartiers traditionnels.

Résultat, les déplacements à pied relèvent du jeu d’arcade. Il y a une énigme à trouver tous les 300 mètres pour progresser de 300 mètres.

Exemple vécu par les Piche pour se rendre au Musée National de Malaisie.

Départ : la station du monorail. Traverser une ou deux avenues au trafic intense. S’engager sous un tunnel de béton, au-dessus duquel se trouve le chantier d’un gratte-ciel. Après 200 mètres dans le bruit et la fureur qui règne là-dessous prendre un petit escalier dérobé sur la droite, il donne accès à un escalier plus grand qui débouche dans une rue face à la gare centrale de Kuala Lumpur.

Traverser la gare au niveau 0, puis au niveau 1. En sortant on se trouve devant l’immense bâtiment de l’hôtel Méridien. Traverser le parking situé sous l’hôtel. On parvient alors à une bretelle d’accès d’une double voie rapide située en contrebas. Infranchissable. Les Piche scrutent le paysage, cherchent la solution, cela dure 10 minutes. Ah ! Un petit trottoir de 50 cm de large permet d’accéder à un escalier à peine visible, là-bas à 100 m de l’autre côté d’une seconde bretelle. L’escalier descend d’un niveau et amène en bordure d’une rue « normale » qui donne accès à une passerelle, laquelle franchit la voie rapide. Encore quelques mètres et c’est l’entrée dans le parc central de la ville. Un sentier, sans indication, paraît aller dans la bonne direction. Une petite colline, l’arrière d’un bâtiment à contourner et voilà l’entrée du Musée National ! Facile !

Raoul, au caissier : « C’est vous qui devriez nous payer pour être parvenus jusqu’ici ». « Vous n’êtes pas venus en voiture ? » « Non !!! » Parfois il est suspect d’être piéton.

En comparaison, Singapour est une ville respirable, avec moins de gratte-ciel, moins hauts, plus d’espaces verts, de la place pour les piétons et un excellent réseau de transports publics.

A Singapour les Piche ont vu une remarquable exposition organisée autour des objets remontés de l’épave du Titanic.

Lorsqu’ils contemplent les noms aux sommets des gratte-ciel de Kuala Lumpur et de Singapour, ils ne peuvent s’empêcher de faire un rapprochement : Chartered Bank, ING Bank, Maybank, UCO Bank, Bank of east Asia, Barclays, HSBC, Indian Bank, KBC Bank, RHB islamic Bank, City Bank etc. Ne sont-ce pas là autant de Titanic qui se dirigent vers des écueils dont ils font fi comme d’autres ont ingnoré les icebergs de l’Atlantique nord le 12 avril 1912.

To big to fail ?

Le Titanic, lui aussi était réputé insubmersible…

Curry de tête de poisson

Lundi 19 mars 2012

La synthèse la plus improbable de deux cuisines aux antipodes l’une de l’autre est réalisée par les Malaisiens de Penang, le porridge aux grenouilles ! Le porridge des Anglais et les grenouilles des Français dans la même cassolette, un exploit culinaire.

A GeorgesTown, capitale de l’île de Penang, le mot « mélange » est le maître mot : mélange des mets, des races, des langues, des architectures caractérise cette petite ville classée au patrimoine mondial de l’humanité. Tous les peuples d’Asie, et d’ailleurs, se retrouvent : Chinois, Indiens, Birmans, Javanais, Arabes, Arméniens, Japonais, Ceylanais, Malais (il y en a aussi…) sans compter quelques autochtones aux appellations étranges Aceh, Bugis, Minangkaban. Claude Guéant s’il venait à Penang en aurait les cheveux qui se dressent sur la tête : toutes ces communautés vivent en parfaite intelligence depuis 300 ans. A croire que c’est lorsqu’elle est insuffisante que l’immigration pose problème.

Dans le quartier indien on est vraiment en Inde. Musique Bollywoodienne aigrelette à fond, femmes en sari, hommes à la peau très foncée, vendeurs d’épices, innombrables bijouteries étalant les ors si prisés, tailleurs, restaurants, temples, tout y est. Une rue à traverser et on se retrouve en Chine. Enseignes écrites en chinois, journaux chinois, temples bouddhistes, ateliers de toutes sortes, couleurs rouge et or, anciennes et magnifiques maisons d’ex-riches marchands transformées en musées qui servent de décors à des films (« Indochine » a été tourné dans l’une d’elles).

La beauté du centre de la ville tient pour beaucoup à l’architecture coloniale britannique des maisons alignées les unes contre les autres et cela quelle que soit la « coloration » du quartier. Avec la richesse croissante de la Malaisie, les restaurations de ces maisons vont bon train, le classement par l’Unesco agissant comme un catalyseur.

Rose et Raoul Piche appréhendent cette plaisante diversité de la façon la plus triviale, par la bouffe !

Ils ont leur rond de serviette au Red Garden, un « food court » où sont rassemblés une vingtaine d’étals de cuisine, chacun avec ses spécialités, ce qui leur permet de découvrir toutes les saveurs d’Asie. Celle du Laksa (typiquement malaisien) soupe de poisson aigre douce au tamarin avec des nouilles, du Koay Teow qui mêle crevettes, fruits de mer, légumes et nombre d’autres éléments non identifiés, curry de tête de poisson, Wan Tan Mee, Hokkien Mee, Nasi Kandar, Cendal, etc.

Rose et Raoul qui en 20 ans ont englouti près de 1000 douzaines d’huîtres n’ont pas pu franchir le pas de l’huître frite, pourtant spécialité de Penang. Tolérants les Piche, certes, mais il y a des limites à l’hérésie ! Idem pour le porridge aux grenouilles. Rose a mangé les grenouilles mais a refusé le porridge. On met l’identité nationale où l’on peut. Content Monsieur Guéant ?