Spécial manifestations au Caire

Nous sommes le vendredi 25 janvier, ça barde au Caire. Et bien sûr, les Piche sont dans la capitale égyptienne.
Résumé de cette journée assez spéciale telle qu’ils l’ont vécue.
Avertis par un journaliste français résidant dans leur hôtel que, ce jour là, la manifestation serait plus sérieuse que les deux jours précédents, Rose et Raoul décident de rentrer tôt à leur hôtel après une visite aux Pyramides. Cela ne s’est pas vraiment passé ainsi.
Lorsqu’après leur balade sur le plateau de Guizé, les Piche se font raccompagner en ville en taxi, celui-ci ne peut franchir le Nil, les ponts étant fermés à la circulation. Mais pas aux piétons. Rose et Raoul traversent donc un pont avec pour objectif de contourner le centre ville pour ne jamais se trouver dans la manifestation. Mais ils doivent se rendre à l’évidence la manifestation s’étend au delà de la place El Tahrir, coeur des événements de la veille.
Alors qu’ils sont encore loin du centre, dans une rue parallèle à la leur, ils aperçoivent des manifestants bombardés de gaz lacrymogène. Les Piche étant sous le vent en prennent une dose et pleurent, comme les autres passants. Ils décident donc de s’éloigner plus encore et de parcourir un très large cercle pour s’approcher du quartier de leur hôtel par l’est en passant à bonne distance des bâtiments officiels et de la ville moderne.
Ca marche.
Aucun manifestant dans les quartiers traversés mais des gens enthousiastes qui, à la vue de ces deux étrangers, crient en anglais « révolution » avec de grands sourires.
Dans les cafés, les vieux fument tranquillement la chicha tout en regardant la télé qui diffuse les événements. Rose et Raoul voient que ça ne rigole pas. Sur l’écran télé, un fourgon de police fonce sur la foule, pourchassant les manifestants qui tentent de l’éviter. Des grenades sont tirées à tirs tendus.
Pour trouver leur chemin dans les avenues, les rues, les ruelles, Rose et Raoul disposent d’une carte mais surtout d’un GPS de randonnée dans lequel ils ont entré la position de leur hôtel et d’une règle de navigation. Ils sont donc capables de se situer et de savoir exactement où ils sont et où ils doivent aller.
Parvenus, comme ils le voulaient à l’est du centre ville, ils s’avancent sur une avenue, longue et large, qui aboutit à une place où ils aperçoivent beaucoup de monde. Trop à leur goût. Ils s’engagent alors dans d’étroites ruelles. Là, les gens vaquent à leurs occupations comme si de rien n’était. Tout est calme. Guidés par leur instrument de navigation, Rose et Raoul cheminent dans les ruelles et finissent par déboucher sur une avenue, calme elle aussi. Le GPS leur indique qu’ils ne sont plus qu’à un kilomètre de leur hôtel. Ils franchissent l’avenue et pénètrent dans une rue qui leur permet de faire un cap quasi direct sur leur objectif. 900 m, 800 m, 600 m, 500 m. Là, des dizaines et des dizaines de cars de police. Des policiers barrent les accès latéraux à cette rue. Pas de bruit de grenade, pas de rumeur, pas de fumée. Les Piche progressent. 300 mètres de l’hôtel. Il fait nuit désormais. Dans l’air quelques relents de gaz poussés par le vent. Quelques larmettes. Rose et Raoul ne reconnaissent pas les rues dans lesquelles ils marchent alors qu’il se savent tout près du but. 200 mètres, ils suivent le GPS. 100 mètres. Peu de gens dans ces rues parfaitement calmes. « Là, l’hôtel !», s’écrie Rose tel un navigateur apercevant la terre.
Après quatre heures de marche et après avoir traversé des quartiers résidentiels, populaires, historiques les Piche trouvent leur petit hôtel aux 6ème et 7ème étages d’un immeuble bourgeois.
A aucun moment ils ne se sont sentis en danger. Les manifestants n’étaient pas des fous de dieu mais des jeunes aspirant à la démocratie. Ils étaient plutôt bienveillants vis à vis des occidentaux qu’ils voulaient témoins de leur colère contre Moubarak. Quant à ceux qui ne manifestaient pas, ils n’avaient de cesse que de vouloir protéger les Piche et les empêcher de prendre des risques. Les policiers, eux, voyaient dans ces deux promeneurs des touristes tentant de regagner leur hôtel et les laissaient passer là, où, parfois, ils bloquaient des Egyptiens.
Néanmoins, Rose et Raoul avaient conscience que ce qui se passait était sérieux. Mais ce n’est que le lendemain matin, lorsque leur ami journaliste leur a montré le sujet qu’il avait tourné pour Arte qu’ils ont vraiment découvert l’ampleur des événements.
N’ayant ni internet (coupé dans tout le pays), ni TV, les Piche en savaient moins que le reste du monde sur ce qui se passait à quelques centaines de mètres de leur hôtel situé à côté de la place Tahrir!
Pas très glorieuse cette journée passée à essayer d’éviter une manifestation qui avait toute leur sympathie mais Rose et Raoul Piche n’avaient guère envie de tâter de la matraque ou de la geôle égyptienne. Ni l’une ni l’autre n’ont bonne réputation.
Les jours suivants, les Piche se sont contentés de quelques sorties à l’extérieur dans la matinée lorsque les badauds venaient voir les résultats des échauffourées de la nuit. Ils cherchaient aussi à acheter quelques provisions, tous les restaurants étant fermés comme d’ailleurs la quasi totalité des magasins. A une exception près, bien sûr : les petits épiciers arabes !
A bientôt, depuis d’autre cieux.
PS Nous sommes maintenant le mardi 1er février. Jour de la manifestation monstre au Caire. Rose et Raoul Piche ont quitté leur hôtel à 9h du matin. Ils ont patienté dans d’énormes embouteillages, avec l’impression que tous les Cairotes quittaient la ville. A l’aéroport, le niveau de pagaille atteignait 10 sur l’échelle du chaos aéroportuaire qui compte 10 niveaux.
Il est 23h03. Rose et Raoul Piche sont assis sur un banc de l’aéroport de Casablanca en attente de leur avion pour Dakar. Départ 1h.00 arrivée 4h et qq.
Ils vont se reposer un peu avant de contacter le mouvement démocratique révolutionnaire sénégalais pour mettre un peu d’ambiance dans le pays.
Jordanie, c’est fait. Egypte, c’est fait. Sénégal, on arrive. Le Bénin est prévu pour les élections de mars.
C’est chouette les vacances.
Re bises à tous.

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