Survivre dans un demi mètre carré

Milan, 8 janvier 2005

- Regarde la fille dans la file d’à côté. Elle a le ventre nu entre son débardeur et son pantalon et le haut de son string qui dépasse.

- Eh alors! C’est la mode depuis un moment. Faut sortir Raoul !

- Oui mais elle tire sur ce débardeur comme une malheureuse pour se cacher. Pas si à l’aise avec la mode. Je la plains.

- Tu préfères sans doute celle de derrière. Voilée de la tête au pied. C’est aussi très à la mode. Mais moi c’est elle que je plains, lance Rose à Raoul qui avoue quand même sa préfèrence pour le ventre rosé.

Dans le hall de l’aéroport de Milan prêts à embarquer à destination de Buenos Aires, Rose et Raoul Piche portent ainsi leurs premiers regards de voyageurs, débutant un périple qui doit les conduire du nord au sud de l’Argentine et au Chili.

Le second regard de Raoul, les yeux rivés au hublot, est pour les lumières orangées des villes aux allures de bijoux brillant dans la nuit. Barcelone, Madrid, Lisbone, Fortaleza… autant de joyaux ensommeillés vus dans la hauteur de l’obscurité par une nuit sans nuage sur 12000 km de distance.

La poésie du spectacle n’efface pas pour autant l’inconfort de la situation. Si Rose dort plutôt bien, Raoul survit mal dans son demi mètre carré d’espace, coincé par le siège de devant. Allez savoir pourquoi, à ce moment là, lui revient à l’esprit la parole de Sir Francis Chichester disant que “le bateau est le moyen le plus lent, le plus cher et le plus inconfortable pour aller d’un endroit à un autre”. Raoul se dit que l’avion bat largement le bateau sur le point trois en attendant le point deux.

A peine leurs valises posées, les Piche gagnent l’un des quartiers animés de Buenos Aires le dimanche. Dans les rues, autour du marché d’antiquités, musiciens et danseurs de tango argentin offrent leurs spectacles aux chalands.

Pour Rose et Raoul Piche, le voyage commence vraiment.

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