“C’est un fils de pute, mais au moins c’est le nôtre!”

Leon, 12 février 2004

- Viva el Fronte Sandinista de Liberacion Nacional !

- VIVA !

- Viva la revolucion !

- VIVA !

- Vive Sandino !

- VIVE !

Les Piche, assis, on ne sait par quel hasard, parmi les officiels de cette réunion électorale du Front Sandiniste de Libération Nationale (FSLN) de Leon au Nicaragua, ne perdent pas une miette des discours enflammés et des chants passionnés qui animent la rencontre.

Tout, à Leon, rappelle que l’on se trouve au berceau du mouvement qui s’est toujours opposé aux dictateurs Nicaraguayens.

Ernesto Sandino est un héros dont l’aura est à l’égale de celle du Che.

La lutte la plus longue et la plus féroce a opposé les Sandinistes à la lignée des Somoza dictateurs de père en fils qui ont mis le pays en coupe réglée jusqu’à s’approprier 30% des terres avec la bénédiction des Etats-Unis.

De Somoza père, Roosevelt disait “c’est un fils de pute, mais au moins c’est le nôtre!”. De la haute politique que l’on n’a pas oublié à Leon surtout après que Ronald Reagan ait passé une seconde couche avec les tristement fameux “contra”.

Au musée Sandiniste, un vieux combattant des années 80 rappelle tout cela aux Piche d’une voix chaleureuse, les yeux pétillants d’intelligence, en déroulant avec enthousiasme un récit clair, argumenté et émouvant. Quelle tendresse lorsqu’il parle de la vie des “campesinos”, ses frères, constamment floués par le pouvoir.

La politique est omniprésente à Leon.

Jusqu’au marchand de Coca Cola de la gare routière qui livre à Raoul son opinion sur le pouvoir en place. Le mot “corruption” est celui qui revient sans cesse. Comment en serait-il autrement au moment où le parlement du Nicaragua débat d’une amnistie couvrant les actes du précédent président Arnoldo Aleman (ex-maire de la capitale…) condamné à 30 ans de prison pour avoir détourné 28 millions de dollars? Même la presse s’offusque de cette “Ignoble amnistie”.

Le Nicaragua est le premier pays d’Amérique centrale où les Piche rencontrent des gens qui engagent spontanément la conversation avec curiosité et gentillesse.

Ah! Ce pêcheur de l’île d’Ometepe sur le lac Nicaragua qui parle avec chaleur de son île : “nous avons, des poissons, des fruits, des légumes, de l’eau douce … et nous n’avons jamais connu la guerre. Les gens venaient se réfugier ici. Il n’y a pas eu de combat”. En guise d’au revoir un “merci de nous rendre visite!” qui va droit au coeur des Piche.

Dans les autobus, les femmes parlent facilement à Rose. Dans les commerces les dialogues sont parfois surprenants, comme à la Banco Central de Rivas lorsque Raoul demande à changer 200 dollars.

- Nous prenons 5% de commission

- C’est beaucoup

- Il y a une autre banque qui n’en prend pas. C’est la Bancentro. A 200 mètres sur la gauche en sortant, à côté du supermarché Pali.

- Ah! Bon. Ben, merci et au revoir

- A votre service !

Pourtant, en dépit de l’indéniable chaleur humaine des Nicaraguayens, le Nicaragua demeure un pays de misère et de violence.

Des organismes s’efforcent de réduire la violence familiale, très répandue, dont sont victimes les femmes et les enfants (garçons et filles). Une campagne sur le thème “un verre de lait par jour et par enfant” donne la mesure du déficit alimentaire des jeunes.

Quant aux zones franches (les maquilas) qui fleurissent ici et là, elles sont avant tout des zones de non droit. Le salaire n’y atteint pas un dollar par jour mais elles permettent aux hommes politiques qui ont favorisé leur implantation de se prévaloir de la création d’emplois.

Si l’assassinat de Carlos Guadamuz, journaliste, ex-responsable Sandiniste, intervenu le lendemain de l’arrivée des Piche au Nicaragua (totalement innocentés) est une exception dans la sphère politique, il témoigne néanmoins de la violence latente dans le pays.

Les Piche ont fini par quitter Leon, avec regret, quasiment pour des raisons climatiques. Lorsque la température atteint 37ºC à l’ombre, 40ºC dans les autobus et qu’à 33ºC l’air leur paraît frais, Rose et Raoul se disent qu’il est temps d’aller voir plus haut et plus vivifiant. A Matagalpa, dans la forêt noire par exemple.

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