La route n°7 transperce la cordillère dans un paysage minéral surchargé de camions

Mendoza, 25 février 2005

Au début les Piche ne sont pas dépaysés : des vignobles à droite, des vignobles à gauche, la route nº7 qui relie l’Argentine au Chili en franchissant la cordillère des Andes par un col à 3300 m d’altitude a des allures de RN 113 traversant le Languedoc.

Les vignes sont simplement plus soignées, mieux organisées avec des ceps qui montent haut pour faciliter la cueillette. Elles produisent d’excellents vins que Rose et Raoul ont dégusté dans plusieurs caves et au restaurant.

Après les vignes, la route nº7 traverse les pré-Andes en suivant un torrent chocolat qui s’écoule puissamment et finit par remplir, tel un bol géant, le lac de barrage qui interrompt son cours.

Une vieille voie ferrée, parfois ensevelie sous les éboulis, parfois suspendue dans le vide lorsque le sol se dérobe sous elle, chemine de conserve avec la route et le torrent. Tous les trois progressent lentement vers le col dans ce qui fut une vallée glacière.

Finie la végétation, la route nº7 entre dans le règne du minéral. Les collines environnantes prennent progressivement de l’altitude et virent au rouge, au jaune, au gris, au noir, au vert. Les parois rocheuses tantôt lisses, tantôt sculptées par l’érosion s’affaissent à leurs bases en éboulis grandioses.

A 2700 m une station de ski  avec ses télésièges et cinq ou six hôtels aux toits étrangement vert pomme dans un paysage de rochers et de cailloux. Les Piche empruntent un de ces télésièges en songeant qu’au même instant, en Europe, d’autres font pareil, les skis aux pieds, dans le blanc de l’hiver.

A 2800 m, nouvelle halte au pont de l’Inca où des sources thermales d’eau pétrifiante ont réussi à jeter un pont de pierre au dessus du torrent chocolat avec la complicité du glacier millénaire (en s’écoulant sur la glace, l’eau pétrifiante a créé une couche de pierre qui s’est épaissie avec le temps. Lorsque le glacier a fondu, il a laissé le vide sous cette couche, faisant apparaître un pont).

Plus l’altitude s’élève, plus la voie ferrée manifeste de faiblesses, résultats des attaques de la neige, de la glace, des chutes de roches et des tremblements de terre. Pourtant, elle fut pendant longtemps le principal moyen de communication vers le Chili.

Aujourd’hui, ce rôle est tenu par la route nº7 par laquelle transite le trafic de marchandises venu du Brésil, du Paraguay, d’Uruguay et d’Argentine pour s’embarquer à Valparaiso vers l’Asie.

A l’approche du col, entre deux collines apparaît un massif enneigé, l’Aconcagua. Grosse déception de Rose et de Raoul, ” c’est donc ça l’Aconcagua, le seul 7000 m d’Amérique ?”. Il est vrai que son sommet formé par une crête horizontale n’offre pas la vision saisissante du Fitz Roy ou des pics de Torres del Paine pourtant bien moins hauts.

Parvenus au col à 3300 m, les Piche en veulent plus et prennent l’ancienne piste qui grimpe à 4000 m  en d’impressionnants lacets plongeant sur un vide effrayant qui ne laisserait aucune chance si par malheur…

Revenus sur la route nº7, les Piche franchissent la frontière avant de plonger vers la plaine chilienne par une nouvelle succession de lacets qui font perdre 1000 m d’altitude en rien de distance.

Dans la plaine le bus retrouve la chaleur, la végétation, les lignes droites.

Ce soir Rose et Raoul dormiront à Valparaiso.

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