Toucher les baleines !

- Là !

Le souffle du cétacé se fait entendre avant que l’oeil de Raoul n’en cerne l’origine. Mais Rose a la vue aiguisée et désigne la longue forme grise qui dépasse à peine de la surface en soufflant à nouveau.

Bingo !

Les Piche tiennent leur première baleine. Elle évolue dans le chenal Puerto Lopez Mateo large de quelques centaines de mètres seulement et long de plusieurs dizaines de kilomètres.

Pas une once de hasard dans cette rencontre. Puerto Lopez Mateo, sur la côte Pacifique, en plein désert de la péninsule de basse Californie est l’un des endroits au monde où les baleines grises viennent se reproduire et mettre bas leurs “petits” baleineaux de près d’une tonne qu’elles nourrissent et accompagnent pendant plusiers mois. L’étroitesse du chenal fait qu’il est facile de les approcher sans avoir à parcourir des miles en mer.

Après cette première rencontre, suit une seconde, puis une troisième puis, puis, puis les baleines sont de plus en plus proches jusqu’à souffler devant l’étrave des Piche, en montrant leur dos gris, impressionnant de largeur.

Le plus souvent, ce ne sont pas une queue qui émerge mais deux, étroitement liées, celle de la mère et de son “bébé”.

Apercevant une barque immobile avec un baleineau collé tout contre, le capitaine de l’embarcation des Piche s’approche lentement. Complaisant, pas effrayé du tout, le baleineau se laisse caresser puis d’un mouvement ample et lent, il décide de s’éloigner en passant sous la barque des Piche à se frotter contre ! Dans sa manoeuvre, il nage à quelques centimètres de Rose qui n’ose pas le toucher.

Quelques minutes plus tard, la scène se répète avec un baleineau qui prolonge le contact avec les visiteurs, semblant y prendre du plaisir.

Il a raison d’en profiter car dans un mois fini de batifoler dans les eaux tièdes, calmes et sûres de basse Californie. Ce sera le retour vers les eaux froides au nord du Canada. Une “balade” de plus de 6000 km avant de revenir ici, l’an prochain, entre janvier et mars.

Si le spectacle l’enchante, Raoul n’en demeure pas moins d’une extrême perplexité : “comment, diable, ces baleines font-elles pour trouver sur des milliers de côte du Pacifique, l’entrée si étroite de ce chenal  Puerto Lopez Mateo ?”.

Non seulement, il n’a aucun début d’explication mais en plus cela lui rappelle un souvenir lointain, tout aussi extraordinaire : celui des énormes tortues luth (450 kg pièce) qu’avec Rose et leurs petits (les petits de Rose et de Raoul…) ils ont vu sortir de l’océan, ramper en soufflant avec peine jusqu’en haut de la plage des Hattes en Guyanne française, y creuser un trou profond, y pondre leurs oeufs dans une souffrance manifeste puis reboucher le trou et regagner l’océan ! Un océan qu’elles traversent depuis l’Afrique pour venir précisément pondre sur cette plage et pas sur une autre. Exploit qu’elles renouvellent tous les ans… comme les baleines plus au nord.

Le soir venu, les Piche reprennent leur voiture et se dirigent avec une précision diabolique vers leur hôtel à 300 km de Puerto Lopez Mateo en appuyant sur la touche “GO” de leur GPS. Non mais des fois…

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