Déluge sur Dumaguete et Cebu

- Je me demande si nous ne leur portons pas la poisse aux Philippins. Tu as vu ce qui tombe ? Le même déluge que chez nous les jours où nous sommes inondés.
- Oui, mais ici ce sont les tropiques, ils ont l’habitude.

Faux !

Le lendemain, au vu des dégâts, les Piche se rendent compte que cette pluie intense qui a durée un jour et une nuit n’est pas habituelle. Ce que leur confirment plusieurs personnes.

Les maisons de bambous appuyées sur les bords bétonnés d’une rivière que Rose et Raoul avaient aperçues deux jours auparavant, ne sont plus que de lamentables amas de débris. A quelques kilomètres de la ville, les Piche arrivent à un village coincé entre mer et montagne. Dévalant des hauteurs, un torrent de boue a charrié blocs de pierres, arbres, branchages qui ont envahi et bombardé les frêles demeures.

L’eau stagne encore dans les maisons et les commerces situés en contre-bas de la route.

Ici, un cocotier est entré par la porte puis a commencé à sortir par la fenêtre avant de se décider à rester là. En plein milieu de l’habitation. Munie d’une machette, le propriétaire entreprend laborieusement de le couper en morceaux pour l’évacuer. Il sourit à Raoul lorsque celui-ci prend une photo.

Plus loin, le fabricant de cercueils, hilare, pose une bouteille de San Miguel à la main devant sa production qui émerge des flots au rez de chaussée. Le plus « beau » modèle, blanc, doté de décorations kitchissimes vient d’être sorti sur la route et placé sur des tréteaux. L’artisan l’exhibe fièrement. Il soulève le lourd couvercle pour que Raoul en apprécie l’intérieur comme s’il s’agissait d’un appartement témoin.

De l’autre côté de la route qui traverse le village, l’épicière a sorti le contenu de sa boutique pour trier et faire sécher. Les Piche ont trop vécu la même scène pour ne pas compatir et le manifester à cette femme désolée. Son voisin, le marchand de bois, a vu son hangar s’effondrer et son camion verser dans un éboulis.

La gargote du village à ouvert malgré tout. Pour y accéder, des planches ont été disposées sur des caisses de bière retournées. Avec leur bardas, les Piche empruntent l’étroite passerelle pour accéder à une table. Rose se dirige ensuite vers les casseroles dont elle soulève les couvercles pour connaître le menu, comme cela se pratique habituellement. Il faut faire vite, le bus qui doit les amener vers le nord va arriver d’un instant à l’autre. Deux adobos de poulet avec du riz blanc, parfait.

Le long de la route, Rose et Raoul aperçoivent le spectacle désolant de maisons traditionnelles dévastées.

« Dans son infinie bonté, le ciel a surtout frappé les plus pauvres », note Rose.

Lorsqu’ils apprennent que l’épisode a fait cinq morts, Raoul, de son côté, a une pensée pour son croque mort. « Sa petite entreprise ne connaît pas la crise… ».

A bientôt.

Pour voir des photos relatives à ce texte et au lendemain plus ensoleillé, cliquez ci-dessous.

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