Le plus beau serpent de pierre du monde, le plus long aussi

Pékin, 20 mai 2006

“C’est assurément un grand mur” avait déclaré en 1972 Richard Nixon, lors de sa visite à la muraille de Chine à l’occasion de son célèbre voyage. Le premier d’un président des Etats-Unis en Chine communiste.

Pour asséner une telle banalité, l’homme devait être sous le coup d’une forte émotion.

Sans doute celle qui saisit tout visiteur lorsqu’il découvre la splendeur inattendue de cette oeuvre incongrue qui se marie avec la nature pour produire de la beauté.

Sa trajectoire bizarre est ce qui frappe les Piche lorsqu’ils découvrent la muraille à Simatai, à 130 km au nord-est de Pékin : elle suit la ligne de crête des montagnes ce qui la conduit à adopter des pentes très fortes pour atteindre certains sommets avant de plonger de façon tout aussi abrupte pour gagner le fond des  vallées. De plus, elle zigzague pour aller d’un mont à un autre et pour se maintenir toujours au plus haut.

Le résultat est un interminable serpent de pierres, paré à intervalles réguliers de tours de guet, qui rampe à travers le paysage à perte de vue avec une élégance qui n’était sans doute pas la première préoccupation de ses concepteurs.

Rose et Raoul Piche ont parcouru la muraille pendant plus de sept heures lors de promenades réparties sur deux jours. La topographie des lieux leur offrait tantôt des vues plongeantes à couper le souffle, tantôt des vues en contre-plongée qui leur laissaient entrevoir des montées pénibles sur des marches inégales et souvent défoncées.

Au détour d’un virage Raoul tombe en arrêt en voyant un photographe monter vers lui : “Voilà un vrai pro de la photo !”", s’exclame-t-il au vu de l’équipement du monsieur. “Eh ! oui, ça fait plaisir d’entendre parler français !”” s’entend-il répondre !

La conversation s’engage. Photographe Français vivant en Australie, l’homme est chargé par le “PowerHouse Museum” de Sydney d’effectuer un reportage sur le thème “La muraille de Chine”. Il revient de Mongolie, du Tibet et de mille autres lieux où il a été la photographier. ” En plus vous êtes payé pour ça ! lance un brin jaloux Raoul. Il y en a qui ont vraiment de la chance !” “C’est ce que je me dis tous les jours” lui répond le photographe tout sourire, en ajoutant “Hélas, en sept ans, c’est le premier boulot vraiment passionnant que j’ai eu”. Et chacun de repartir vers son bout de mur.

Revenus à Pékin après un détour par Chengde pour visiter le palais d’été des empereurs, les Piche font les marchés.

Le plus intéressant est sans conteste celui des “puces” de Panjiayuan où est proposée une invraisemblable variété de copies d’antiquités, de porcelaines, de bronzes, de pierres, de peintures, de bois sculptés etc.

L’autre marché, Hongqiao, moins spectaculaire, est néanmoins très curieux par son organisation. Il s’agit d’un grand bâtiment de trois étages avec un entresol. “Ça pue” déclare immédiatement Rose dès son arrivée sur les lieux.

Au rez de chaussée est vendu tout ce que l’industrie chinoise peut produire de gadgets et de contrefaçons électriques et électroniques.

Au premier sont principalement vendus des colliers de perles de toutes les couleurs mais “juré, craché”, toutes authentiques à 2 euros le collier…

Aux 2º et 3º étages, des boutiques de luxe vendent de véritables bijoux. Le lien entre ces étages c’est l’odeur, une terrible odeur de poiscaille qui irradie de la contrefaçon à la joaillerie top niveau.

Les Piche en sont surpris.

En quittant l’immeuble Raoul devine qu’à l’entresol il y a “autre chose”. Après avoir descendu dix marches, ils pénètrent dans un marché aux poissons fourmillant d’activité, l’odeur suffoque à la première inspiration mais le spectacle fait oublier ce désagrément.

Ici des langoustes vivantes sont déballées de leur caisse arrivant en droite ligne d’Australie, là une tortue est dépecée à vif, à même le sol, ailleurs un bel étalage de concombres de mer, partout des aquariums où sont stockés les animaux vivants : crevettes, soles, serpents de mer. Partout, des caisses et des caisses de poissons sur leur lit de glace.

Acheteurs et vendeurs s’interpellent dans un brouhaha assourdissant, mais quel spectacle !

Aucun touriste occidental en vue. Tous sont agglutinés aux étages supérieurs pour leurs achats de pacotilles ou de grand luxe. Ils profitent seulement du fumet de cet étonnant marché et se privent de la dégustation que constitue la visite de l’entresol.

PS “Si ton ordinateur ne fonctionne plus, une fois, finit les proverbes chinois”, proverbe Belge.

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